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African Population Studies/Etude de la Population Africaine, Vol. 22, No. 1, 2007, pp. 107-135 Les Déterminants Familiaux de lEmigration Rurale au Burkina Faso Dr. Bonayi DABIRE, ISSP, Ouagadougou Résumé Les approches classiques de lanalyse des déterminants des migrations, centrées sur les déterminants individuels, ont montré leur limite. Des théories alternatives plus récentes stipulent que la migration est une stratégie collective de minimisation des risques. Sappuyant sur ces théories, et à partir dune enquête réalisée au Burkina Faso, cet article analyse le rôle du ménage comme déterminant collectif de la migration. Létude utilise les modèles univariés et multivariés pour analyser le rapport entre les caractéristiques collectives du ménage et le risque quun membre du ménage émigre. Les résultats montrent que les ménages étendus (plusieurs noyaux, et plusieurs segments de lignage) sont des foyers démigration de même que les ménages nayant aucune expérience migratoire, cest-à-dire où il ny a ni migrants de retour, ni individus partis en émigration. Par contre les ménages nucléaires, et ceux ayant un passé migratoire riche, enregistrent très peu démigration. Introduction La migration est un phénomène de société au Burkina Faso. Elle nest ni spécifique à une région, ni à une ethnie, même si par ailleurs son intensité peut varier dune ethnie ou dune région à une autre. Lampleur des migrations a été mise en relief par de nombreuses enquêtes (enquête de 1974[1], enquête de 1991[2] de lINSD, enquête de lUERD en 2000[3]). La population dans son ensemble est très mobile. Au cours de lannée 1996 par exemple, 3% de des individus ont effectué un déplacement de plus de 6 mois en dehors de leur province habituelle de résidence (INSD, 2000) et entre 1995 et 2000 on a dénombré près de deux millions et demi de migrations internes et internationales (UERD, 2002). En Afrique subsaharienne le Burkina est parmi les plus gros fournisseurs de migrants, notamment en direction de la Côte dIvoire (CERPOD, 1995[4]). Si les chercheurs saccordent sur le contexte historique du déclenchement ou plus exactement de lintensification de la migration au Burkina Faso, (Songré, 1972; Boutillier, 1975; Lahuec, 1979; Piché et al., 1981; Coulibaly, 1986 ;Grégory J., 1988), la connaissance des déterminants qui perpétuent et entretiennent cette migration lest moins. Les caractéristiques individuelles et les contraintes macro-économiques sont les principaux déterminants quévoquent les chercheurs dans lanalyse des migrations dans les pays en développement. La migration serait, sur un plan micro, une réponse individuelle aux déséquilibres des rémunérations du travail entre régions ou pays (Harris et Todaro,1970 ; Todaro,1976). Au niveau macro, elle serait une réponse aux inégalités de développement entre régions et pays, à la distorsion structurelle des économies des pays du Tiers-Monde, aux échanges inégaux entre économies périphériques et économies du centre (Amin,1974; Meillassoux, 1975; Lassonde, l980; Piché et al., 1981; Jemai, 1986). Les approches néoclassiques de lanalyse de la migration ont montré leurs limites (Wood, 1982). Elles ne permettent pas dappréhender le rôle des structures intermédiaires telles le ménage, le village, lethnie, etc. Or limportance de ces structures intermédiaires est déterminante dans la vie sociale notamment dans les pays en développement (Locoh, 1988 ; Quesnel et Vimard, 1999 ; Mahieu, 1997). Aussi, des théories alternatives sont-elles élaborées pour une meilleure prise en compte des déterminants collectifs de la migration. La plus récente, connue sous le nom de « nouvelle économie des migrations » donne une place de choix aux structures intermédiaires tel le ménage et la famille dans l analyse des migrations (Stark, 1978, 1991 ; Harbisson, 1981) Lhypothèse centrale de cette approche stipule que la migration est une stratégie collective de minimisation des risques par une diversification géographique des ressources du groupe familial (Guilmoto et Sandron, 2000 ; Slotnik, 2003 ). Mais si la formulation théorique de cette approche est assez bien documentée, la vérification des hypothèses par des données empiriques reste encore à faire, notamment dans les pays en développement. Le présent article se propose de vérifier certaines de ces hypothèses. En partant de données dune enquête quantitative réalisée au Burkina Faso en 1995, cet article veut souligner le rôle des structures intermédiaires, tel le ménage, dans les déterminants de la migration et identifier les facteurs au sein du ménage qui favorisent ou qui entravent la migration de ses membres. Justification théorique et cadre conceptuel Justification théorique de lapproche La principale valeur dans les sociétés africaines est lappartenance au groupe familial. Le destin dun individu dépend beaucoup plus des décisions et des intérêts de sa famille que de ses propres aspirations (Locoh, 1988). Lindividu ne peut se concevoir en dehors du groupe. Si linfluence des modèles culturels de type occidental est indéniable, les traditions de vie familiale sont encore très persistantes (Sala-Diakanda, 1988). A titre dexemple, une étude réalisée par Locoh (1988) sur un ensemble de 22 pays africains à partir des données de recensement, révèle que la taille des ménages a tendance à augmenter plutôt quà tendre vers les ménages nucléaires, contrairement aux prévisions et aux attentes. Le même effet a été observé au Mali pour la période 1976-87 (Marcoux, 1990). Ces éléments montrent que le groupe familial demeure un repère, voire un refuge pour lindividu. Partant de ce constat, on se demande si les comportements migratoires sont logés à la même enseigne : les décisions et les projets migratoires sont-ils assujettis aux intérêts du ménage ? Certains travaux de recherche au Burkina (Piché et al., 1980 ; Saint-Pierre et al., 1986) ont conclu à la formulation dhypothèses sur lexistence de stratégies collectives de migration. Pour Victor et al.,(1980), les charges et responsabilités familiales ou sociales sont avancées par presque tout le monde pour expliquer le fait que certains ne soient pas partis. En effet, si la migration est souhaitée par le ménage, elle ne doit pas être un élément déstructurant de la société. Une exigence des ménages en zone rurale africaine est la nécessité de leur maintien comme unité de production et de reproduction dans le village dorigine pour gérer le patrimoine ancestral (terre, fétiche, etc.), assurer la retraite des personnes âgées et perpétuer la tradition. Dans cette optique, la migration doit se faire dans le respect du maintien de la famille ou du ménage en milieu rural dans les fonctions essentielles ci-dessus évoquées. Analysant les données de lenquête nationale de 1974-75 sur les migrations au Burkina Faso, Coulibaly et al. (1980) ont mis laccent sur le fait que ces résultats pourraient signifier que la migration relève bien dune stratégie familiale où malgré une situation à lorigine assez semblable, les uns partent pour des raisons économiques (surtout les hommes) et les autres restent pour soccuper de la famille. Il en découle que malgré la volonté et le besoin denvoyer un des leurs en migration, certains ménages ne le peuvent pas (Piché et al., 1986). La migration devenue nécessité intégrée par le groupe familial, et de façon plus générale, par les structures de socialisation de la communauté, sest donc imposée assez facilement à cause du très fragile équilibre entre, dune part, les faibles rendements agricoles, et dautre part, les besoins sans cesse croissants des populations rurales. Pour percevoir la pertinence de cette hypothèse, il faut avoir à lesprit la spécificité du secteur rural burkinabé. Lagriculture, activité principale sinon exclusive dans les campagnes burkinabé, reste largement une activité de subsistance, qui occupe les paysans 5 à 6 mois seulement dans lannée (le temps que dure la saison pluvieuse). Plusieurs auteurs (Sawadogo et Larivière, 1993 ; Poirier et Guiella, 1996) soulignent que le seul recours à lagriculture pour assurer lalimentation des membres du ménage est de plus en plus risqué. La production est insuffisante pour les besoins de la population. Elle est dépendante, entre autres, des caprices et des fluctuations pluviométriques. Les conséquences dune telle situation sont la variabilité très forte des revenus des ménages ruraux dune année à lautre[5], non seulement à cause des aléas de production, mais aussi des fluctuations des prix dun marché sur lequel ils nont aucune emprise. De plus, louverture du milieu rural au monde extérieur et ladoption des modèles de consommation plus occidentalisés et urbains ont développé de nouveaux besoins. Par exemple la demande déducation sest accrue considérablement. Ces besoins ne peuvent pas être couverts par une production de type archaïque que pratiquent les burkinabé. Pour ce faire, les paysans tentent déviter autant que possible que leur profil de consommation soit heurté par leur profil de revenu. Dans ce contexte, les populations rurales sont contraintes de développer des stratégies visant à mettre à contribution différents espaces économiques pour tempérer la précarité de leur situation. Du point de vue du groupe, la migration daujourdhui[6] est linstrument clé utilisé par les ménages ruraux pour une allocation judicieuse de leurs ressources humaines au niveau des espaces disponibles à savoir :
Lutilisation de ces espaces nest pas systématique et napparaît pas toujours possible. Les stratégies utilisées relèvent aussi bien de stratégies de survie (pour les familles très pauvres) que de promotion sociale. Le ménage ou la famille, bien que gérant la stratégie migratoire, nexclut pas une sélectivité et une compétition entre ses membres. Cette sélectivité et cette compétition sont basées sur les droits, les obligations, les aptitudes et le statut de chaque membre dans la famille et dans la communauté, et tiennent compte des conflits dintérêts[7] entre individus au sein du ménage, de la capacité de chacun. Comme le soulignent Dupont et Dureau (1988), au sein de la famille il existe généralement des inégalités entre les membres, eu égard au niveau dinstruction, à la situation professionnelle, à lâge, à lexpérience accumulée, etc. De ce fait, cest lavantage relatif à lémigration de chaque membre pour lunité collective qui commandera le choix de celui qui devra migrer. Les interactions entre le groupe et lindividu sont complexes. Si la migration de lindividu doit être perçue comme une stratégie du ménage, nous ne pensons pas quil faille envisager la décision migratoire comme le résultat dun forum de discussions au sein du ménage pour désigner le migrant. Ce cas despèce nest pas à exclure mais nest pas une condition nécessaire. Dans le groupe familial africain, chaque membre selon ses liens de parenté au sein de la famille, son sexe et sa génération, a un rôle. De ces rôles découle un système dattentes de la part du groupe à légard de lindividu. Par exemple, les fils, de surcroît les aînés, nont pas les mêmes obligations envers la famille que les filles et les cadets. Le fonctionnement harmonieux du groupe suppose que chacun connaisse et intériorise les formes de comportement que le groupe lui permet dadopter et quil a le devoir dadopter sans quon ait besoin de le lui rappeler ou de ly contraindre. Ces droits et devoirs « sont contrôlés par un système de récompenses et de sanctions selon limportance donnée socialement aux comportements concernés » (Piaser,1994 : 60). Ainsi, lindividu ne décide jamais dune manière gratuite. Son choix se fait toujours (lorsque lindividu est correctement socialisé) en tenant compte des règles du jeu social, sous la sollicitation du système de référence auquel il appartient. Aussi, est évidemment fausse lidée dun cloisonnement entre les motivations des individus et les normes des groupes (Roussel,1986). Il découle de ce qui précède que lexplication de la migration ne devrait pas sen tenir aux seules caractéristiques individuelles des migrants en les détachant de tout contexte. On doit remonter au niveau des ménages dappartenance des individus. La recherche des déterminants de lémigration rurale sera axée sur une approche contextuelle, cest-à-dire, une prise en compte de lenvironnement social immédiat (le ménage) du futur migrant. Une telle approche peut contribuer à améliorer linterprétation et la compréhension des comportements migratoires. Il sagira de la prise en compte dans un modèle statistique, des caractéristiques du ménage comme variables explicatives des comportements migratoires individuels. Larticle sintéressera donc à la migration individuelle comme stratégie collective du ménage, comme phénomène conditionné, dans une certaine mesure, par lenvironnement socioéconomique immédiat constitué par le ménage. On sintéresse donc aux caractéristiques collectives comme facteurs explicatifs des comportements individuels. Justification théorique du choix des variablesLa prise en compte du ménage dans lanalyse des migrations est plurielle. Par exemple, dans larticle bien connu de Mincer (1978), qui est une des premières en la matière, il sagissait de mesurer leffet des liens familiaux sur la probabilité démigrer de tout le ménage et les conséquences sur lemploi, les gains des membres du ménage, la stabilité du ménage etc. Dans ce type danalyse où lémigration du ménage dans son entièreté est la préoccupation principale, on sintéresse à la maximisation des utilités individuelles et à la détermination de la localisation optimale de la résidence du ménage. Dans le présent article, la migration collective du ménage ne sera pas lobjet de notre propos. Cest lémigration dun ou de quelques individus du ménage qui est le centre de notre préoccupation. Dans ce cas, le fait quun ménage ait enregistré ou pas au moins une émigration au cours dune année donnée conférera à ce dernier un statut migratoire. Cest ce statut migratoire que nous tentons dexpliquer par les autres caractéristiques du ménage par une approche quantitative. Lunité danalyse est bien le ménage. Y-aurait-il des caractéristiques du ménage qui expliqueraient pourquoi on observe des émigrations dans certains ménages et pas dans dautres ? Telle est la question à laquelle cet article essaie dapporter une réponse. Quels sont les facteurs ou caractéristiques du ménage susceptibles dinfluer sur le comportement migratoire des individus qui le composent ? Sept facteurs nous semblent déterminants dans lexplication des comportements migratoires dans les ménages. Les périodes de disette annuelle et chronique que vivent les ménages rurauxIl existe une période bien connue, particulièrement difficile pour la survie des ménages au Burkina Faso. Cette période de déficit alimentaire pour beaucoup de ménages, qui sétale daoût à octobre, est appelée la soudure (Marchal, 1990 ; Janin, 2003). Nous partons de lhypothèse que « la soudure » peut être un élément structurant des comportements migratoires au sein des ménages. Les ménages qui vivent chroniquement ces soudures - les ménages les plus pauvres en général - intégreront la migration comme source extérieure dappoint ou tout simplement comme stratégie de délestage[8] ? Les solidarités et les transferts entre ménagesLes redistributions entre ménages voisins (ménage de deux frères, ménage du père et du fils ou simplement dun même lignage etc.) sont importantes, mais ne sont jamais prises en compte dans les revenus des ménages (Bloch et Buisson, 1994 ; Vuarin, 2000 ; Kinda, 2003). Or ces apports divers, difficiles à cerner, biaisent les résultats, lorsquon sen tient au seul revenu du ménage. Cet apport extérieur de revenu influence-t-il la propension migratoire du ménage ? Cette contribution extérieure, du fait quelle allège les difficultés alimentaires et/ou financières du ménage, entraînerait-elle léconomie de lémigration au sein du ménage? Notons que cette contribution extérieure peut provenir dailleurs dun migrant, ce qui est souvent le cas, mais pas exclusivement. Certaines aides sont des transferts vivriers intergénérationnels entre ménages de père et de fils. La co-résidence des ménages dans une même unité dhabitationLa cohabitation de plusieurs ménages dans une même concession[9] est une pratique assez courante au Burkina Faso. Si en ville cette cohabitation peut être fortuite (lensemble des colocataires nayant parfois aucun rapport entre eux), en milieu rural ce nest jamais le cas. Lorsque des ménages vivent dans la même concession, il y a toujours une relation de parenté entre les chefs de ménage, et partant dune obligation sociale dassistance mutuelle, une des raisons fondamentales de cette cohabitation qui est, dans une certaine mesure, une stratégie sécuritaire de minimisation des risques. Cette situation peut-elle avoir une incidence quelconque sur la propension migratoire dans ces ménages cohabitant ? Ces ménages qui vivent avec dautres dans la même concession ont-ils plus de facilité à intégrer la migration du fait quils peuvent compter sur la solidarité de voisinage ? Lexpérience migratoire du ménageNous partons de lhypothèse que lexpérience collective du ménage en matière de migration peut avoir un effet sur la migration actuelle. Les ménages qui ont un passé migratoire fourni (beaucoup danciens migrants dans le ménage), nauront-ils pas une propension migratoire différente de ceux nayant aucun ancien migrant ? En général, les migrations burkinabés, que ce soit en direction des zones rurales, urbaines ou à létranger, suivent des filières établies par les primo-migrants, ceux qui ont déjà migré transmettant les informations[10] nécessaires aux autres. La structure démographique des ménagesDans la littérature, leffet de la structure démographique des ménages sur la migration a été mis en relief (Mincer, 1978 ; Saint-Pierre et al., 1986). La présence de beaucoup de personnes dépendant dans le ménage (enfants à bas âge, personnes âgées ou handicapées inaptes au travail etc.), ne peut-elle pas freiner le départ en migration des personnes actives du ménage ? La présence dune personne âgée dans le ménage peut être parfois un ciment, une autorité morale qui maintient les jeunes sur place. Par expérience personnelle, nous avons remarqué que lorsque le patriarche de la famille disparaissait, les jeunes du ménage sen allaient presque tous en migration, parfois le clan se désagrége, et cest souvent loccasion du départ de certains pour créer des ménages indépendants. La taille des ménages et la structure des liens de parenté entre les membresLes ménages élargis, composites, sont-ils plus propices à lémigration de ces membres que les autres (ménages nucléaires)? Il est assez logique de penser que ces ménages composés de plusieurs segments de famille, soient émetteurs de migrants. Les éléments périphériques, cest-à-dire ceux ayant les liens de parenté les plus éloignés avec le chef de ménage, auront tendance à émigrer plus facilement parce quils se sentent moins liés aux intérêts collectifs du ménage. Souvent la migration, permettant une relative accumulation, peut être une des voies pour se détacher et créer son propre ménage. La religion pratiquée par le chef de ménage Capron et Kholer (1975) ont avancé lhypothèse que dans les ménages où lon pratique la religion musulmane, lopposition aîné - cadet était presque inexistante. Cela pouvait avoir un impact sur la migration souvent analysée comme une réponse à ce conflit. La pratique dune autre religion que lanimisme(la religion traditionnelle au Burkina) est aussi une marque douverture, de changement de mentalité et parfois de rupture avec une certaine tradition ou tout au moins la manifestation dune "perméabilité du ménage" qui devrait influer sur les options migratoires. Sources de données et méthode Sources de données Les données utilisées sont issues dune enquête réalisée en 1995 par lUERD. Des informations assez détaillées sur le ménage, ainsi que sur les membres du ménage ont été collectées. Lenquête, qui nest pas nationale, a couvert deux grandes régions : le plateau Mossi (principale zone de départ des migrants) et le Sud-ouest du pays (principale zone daccueil des migrants). Seules les zones rurales ont été échantillonnées. La méthode de sondage était un sondage stratifié par grappes. Au total 505 ménages avec un effectif de population de 5665 individus vivant dans ces ménages ont été enquêtés. Les variables danalyse sont dans une certaine mesure, tributaire des données. Lenquête dont il est question dans cet article na collecté de données ni sur les revenus monétaires des ménages ni sur les productions agricoles ni sur les biens possédés. Définition des principaux concepts - Le ménage Dans les opérations de collecte réalisées par lInstitut National de la Statistique et de la Démographie (INSD) du Burkina, le ménage privé (par opposition au ménage collectif : prison, internat, etc.) est défini comme « un ensemble de personnes, apparentées ou non, vivant sous le même toit, prenant en commun leurs repas et placées sous lautorité dune personne appelée chef de ménage ». Mais dans les instructions concernant le remplissage du questionnaire ménage, il est précisé que dans un ménage, il ne peut y avoir quun couple marié. Cette restriction a certainement lavantage de dissocier les différentes cellules familiales. Mais, le gros inconvénient est que les liens qui unissent ces cellules familiales vivant ensemble dans le même ménage, napparaissent plus nulle part, chaque cellule familiale étant saisie comme un ménage indépendant. Dans le contexte du milieu rural[11] burkinabé, ce qui caractérise à première vue les ménages, outre lunicité de résidence, ce sont notamment la production et la consommation. Lunité de production se caractérise par la mise en valeur dun champ commun (pukazinga). Lappellation la plus adéquate pour une telle unité est le « ménage agricole » ou encore « exploitation agricole ». Le travail en commun sur un même champ est le critère le plus important. Il détermine les autres. Dès que des individus travaillent sur un même champ, cela entraîne, le plus souvent, la consommation commune et lunité de résidence. Si bien que dans cette étude le ménage est défini comme un ensemble de personnes qui résident dans une même unité dhabitation, travaillent dans un même champ et prennent ensemble leur repas. Un autre avantage dune telle définition est lexistence dans la langue locale dune telle appellation (Poukazinga pour lexploitation et Puksoba le chef de lexploitation). Notre souci est de saisir lunité domestique de production et de consommation. Nous privilégions donc lapproche ménage agricole ou exploitation agricole (les deux termes sont équivalents dans lentendement de cet article). A lintérieur des ménages nous distinguerons les noyaux familiaux. - Le noyau familialLes recherches sur la structure des ménages en Afrique ont permis de mettre en évidence les noyaux familiaux et leur importance au sein des ménages. Par noyau familial on entend la cellule familiale biologique, cest-à-dire un groupe de personnes présentant un lien dascendance ou de descendance du premier degré (Pilon, 1989 ; Diop et al., 1991). Il est constitué en général, du couple ou de lun des conjoints et de leurs enfants sans charge, cest-à-dire non mariés et sans enfants. Il peut aussi comprendre des tierces personnes (ascendants directs du chef de noyau, frères, surs, oncles), mais à condition quelles naient pas dautres personnes à leurs charges (enfants par exemple) et quelles fassent partie du ménage. Ainsi les ménages sont constitués dun ou de plusieurs noyaux familiaux. - La migrationLa migration en démographie est généralement définie comme « un ensemble de déplacements ayant pour effet de transférer la résidence des intéressés dun certain lieu dorigine ou lieu de départ, à un certain lieu de destination, ou lieu darrivée » (Courgeau, 1988 : 12). En général, la durée et la distance requises pour quun déplacement soit considéré comme une migration sont variables et déterminées en grande partie par les données disponibles. Il y a un certain arbitraire dans la détermination de ces éléments spatiaux et temporels, lié au découpage administratif du pays, à la nature de la collecte, aux questions posées, et aux préoccupations du chercheur. Compte tenu des objectifs de cette recherche, nous définissons la migration comme tout déplacement dont la durée est de trois mois ou plus, au delà des limites du village[12] habituel de résidence. Cette définition permet de prendre en compte toutes les émigrations temporaires et récurrentes, de courte durée, (moins de 6 mois) qui ont lieu pendant la saison morte (novembre-mai) et qui sont importantes dans le processus migratoire au Burkina-Faso, cette période étant celle choisie pour émigrer sans compromettre lactivité agricole. Trois types de migrations sont possibles : - Les migrations de ménages : départ de tous les membres du ménage; ce type de migration nintéresse pas la présente étude ; - Les migrations dun ou de plusieurs noyaux du ménage ; - Les migrations individuelles. La distinction entre la migration individuelle et la migration dun noyau nest pas aussi évidente. Le cas où tout le noyau part en même temps est le plus typique mais pas nécessairement le plus fréquent. Le chef de noyau peut partir seul dans un premier temps pour être rejoint peu après par les autres membres. Le départ du chef de noyau est une migration individuelle. Si les autres membres le rejoignent en groupe, leur migration sera une migration de noyau. Si ce regroupement du noyau au lieu de destination se fait de façon individuelle, on aura à faire à des migrations individuelles bien que laboutissement soit une migration du noyau. Compte tenu donc de cette difficulté de différencier la migration individuelle de la migration dun noyau lorsque plusieurs personnes émigrent en même temps, chaque émigration sera considérée comme individuelle. Mesure des variables danalyse Le cadre conceptuel ci-dessus élaboré nous conduit à lidentification des variables suivantes pour le modèle danalyse La variable dépendanteComme nous lavons dit plus haut, ce que nous cherchons à expliquer cest le statut migratoire du ménage. Ainsi, on distinguera les ménages ayant enregistré au moins une émigration au cours de lannée écoulée et ceux nayant enregistré aucune émigration. Cette variable prend la valeur 1 si le ménage a enregistré au moins une émigration au cours de lannée écoulée et 0 si non. Sur lensemble des 505 ménages de léchantillon, 105 ont enregistré au moins une émigration au cours de lannée précédent lenquête, dont 82 ont connu une émigration, 19 ont connu 2 et seulement 4 ménages en ont enregistré 3. En mettant dans la même situation les ménages avec une seule émigration avec ceux ayant eu plus dune émigration, il y aura une perte dinformation due au fait qu'on met ensemble des ménages ayant des statuts légèrement différents. Mais vu leffectif déjà faible du nombre de ménages, il ne nous semblait pas opportun dopérer dautres différenciations. Les variables explicatives principales 1- La structure des ménages. Trois variables permettent de prendre en compte ce facteur : - La proportion des enfants de moins de 10 ans du ménage - La structure des relations de parenté au sein du ménage (type de ménage). a)- la proportion des enfants (personnes de 0 à 9 ans) dans le ménage. Nous avons retenu la borne de 9 ans qui peut paraître basse, mais la réalité est que très tôt, les enfants en milieu rural (où le niveau de scolarisation est encore trop faible) entrent dans le circuit du travail. b-La structure des liens de parenté au sein du ménage Nous avons construit une typologie des ménages dont le critère de partition est la composition du ménage selon les liens de parenté entre les individus et le chef. Cette typologie, construite à partir de celle de Ancey (1983), est composée de huit groupes de ménages. Ces différents types de ménage sont une combinaison dun noyau central et de différents segments de lignage. Le noyau central est le ménage nucléaire composé du chef de ménage, de son épouse et de ses enfants non mariés. Les différents segments de lignage sont : - les enfants mariés ; Les huit groupes se présentent comme suit : type 1 : Les ménages disolé et de
deux personnes (26 ménages) ; Un peu plus de la moitié des ménages (52%) a connu une « soudure » .Cette proportion est plus forte dans les zones les plus pauvre du pays( 58 %). 3 - Lapport extérieur du ménageA lenquête, une seule question a été posée : lexistence ou pas dapport extérieur et sa fréquence. Cette aide na pas été quantifiée. Aucune précision non plus na été demandée sur ses origines. Sur les 505 ménages de léchantillon, 220 soit 44% ont déclaré recevoir de façon assez régulière un apport extérieur. 4 - La cohabitation Cette variable a également deux modalités : un ménage vit seul ou cohabite dans la concession avec dautres ménages. Lenquête révèle que 53% des ménages cohabitent. 5- lexpérience migratoire du ménage Deux informations permettent dapprocher lexpérience migratoire du ménage : a)- le nombre de résidents présents du ménage ayant déjà migré au moins une fois dans leur vie. En fait il sagit des migrants de retour. b)- le nombre de personnes du ménage actuellement en émigration depuis moins de cinq ans, en excluant les personnes émigrées au cours de lannée écoulée, puisque cest ce quon veut expliquer. Au-delà de cinq ans, nous considérons la migration comme définitive. Vu leffectif souvent faible de ces personnes (résidents anciens migrants et personnes actuellement en émigration) au sein du ménage, nous avons considéré lexistence ou pas de ces personnes et non leur nombre. La variable expérience migratoire du ménage comportera quatre modalités qui sont : - 1- Pas démigrés ni de migrants de retour dans le ménage ; - 2- Pas démigrés mais présence de migrants de retour dans le ménage; - 3 Existence démigrés mais pas de migrants de retour dans le ménage; - 4 -Existence démigrés et de migrants de retour dans le ménage Les variables de contrôle6- Lâge du chef de ménage 7- La religion pratiquée par le chef de ménageDans lenquête, la question sur la religion a été posée au seul chef de ménage. Mais presque toujours dans les campagnes, la religion du chef de ménage est la religion pratiquée dans le ménage. Nous avons distingué trois religions : lanimisme, lislam , le christianisme et ses dérivés. Tableau 1. Liste des variables indépendantes
Le tableau 2 ci-dessous présente les principaux résultats. Nous avons utilisé le modèle logistique avec le logiciel stata. Nous avons procédé à des analyses bivariées et multivariées. La deuxième colonne (analyse univariée) donne les effets bruts des variables et la troisième colonne (analyse multivariée) les effets nets. Les odds ratios sont les rapports de risque de la modalité sur la catégorie de référence. Structures des ménages et émigrationa) Les facteurs favorisant lémigration des individus du ménage La structure de ménage de type 4 (composés du noyau nucléaire et des enfants mariés ou non), avec un odds ratio de 6,682 (pour les effets nets) est le groupe où la propension migratoire est la plus forte. Les effets bruts, tout comme les effets nets sont très forts et tous significatifs. Il apparaît donc que la présence denfants (mariés ou non ) dans le ménage augmente fortement la propension à émigrer, pas nécessairement des enfants mariés, puisque dans ce type de ménage on trouve également des enfants non mariés. Lexamen des caractéristiques de ces migrants selon le ménage dappartenance aurait permis dêtre plus précis, mais la faiblesse des effectifs des émigrés ne permet pas de pousser lanalyse jusquà ce niveau. En deuxième position, cest dans le groupe des ménages composés du noyau nucléaire et des autres descendants (type 7) que la propension migratoire est forte. Ce type de ménage est assez large du point de vue de sa structure familiale et est composé surtout de jeunes générations qui sont les plus exposées au risque démigrer. Les ménages du type 5, cest-à-dire les ménages avec présence de collatéraux, sont également des foyers démigration. Signalons que les collatéraux sont généralement de même génération que le chef de ménage et devraient en principe avoir leur propre ménage. Ce sont donc des personnes susceptibles daller fonder leur propre foyer. La propension forte de lémigration dans ces ménages est assez logique. Enfin, on observe une propension migratoire assez forte dans les ménages monoparentaux (type 2). Ceci traduit probablement le mouvement des enfants pour aller rejoindre lautre parent. Il apparaît clairement donc que les ménages étendus (plusieurs noyaux, et aussi avec plusieurs segments de lignage) sont des foyers démigration. Tableau 2 : principaux résultats de l'analyse univariée et multivariée
Note : La cohabitation de plusieurs ménages dans une même concession favorise également lémigration. Dans les pratiques villageoises, lorsquon voyage, il faut trouver une personne à qui confier sa famille. Il est rare quun chef de ménage migre, même si cest pour une courte période, sans confier la garde de son groupe familial à une tierce personne. Le fait de partager la concession avec dautres, facilite et encourage cette pratique. En général, lorsque plusieurs ménages cohabitent dans la même concession en milieu rural, leurs chefs ont des liens de parenté assez proches. Lentraide est très forte et va de soi entre ses familles cohabitant. Cette situation favorise lémigration, le jeune candidat à lémigration nayant pas trop de remords à partir puisque son ménage sera assisté en cas de problème par les autres de la concession. Les ménages nayant aucune expérience migratoire, cest-à-dire où il n y a ni migrants de retour, ni de personne partie en émigration, ont une propension migratoire très forte. Le risque de migrer dans ces ménage est plus de trois fois plus élevé que dans les ménages où il y des migrants de retour et des émigrés. b) Les facteurs de rétention de lémigration dans les ménages Le risque démigrer dans les ménages ayant une expérience migratoire fournie (beaucoup de migrant de retour) est très faible. Pour les ménages sans émigrés mais avec des migrants de retour, le odds ratio est de 1,123 et nest pas significatif En dautres termes, ces ménages se comportent comme les ménages ayant une expérience migratoire saturée, cest-à-dire une propension migratoire très faible. Ce résultat est, à première vue, assez contre-intuitif. Plusieurs écrits sur les migrations (Da Vanzo, 1981; De Jong et al., 1981 ; Harbison, 1981 ; Guilmoto et Sandron, 2000) soutiennent que la connaissance dinformations sur le lieu de destination, fournie par les migrants de retour, favorise lémigration. Les migrants de retour fournissent des adresses, des contacts en matière dhébergement et demploi, aux candidats à lémigration. On sattendait à ce que là où il y a des migrants de retour, que le risque démigrer soit forte à cause des filières qui sétablissent. Si cela est certainement vrai au niveau dune communauté (ethnie, région, etc.), on ne doit pas le transposer au niveau du ménage qui est une unité plus réduite. Dans un ménage ayant une expérience migratoire saturée, les membres du ménage ont assouvi leur désir migratoire et cela peut expliquer la faible propension migratoire dans ces ménages. Le risque démigrer dans les ménages nucléaires à un seul noyau est très faible par rapport aux autres types de ménage. Ce résultat est assez logique car les ménages nucléaires, à un seul noyau, comportement généralement les deux parents et des enfants à bas âges. Il ny a généralement pas de migrants potentiels dans ces ménages. Certains autres variables importantes à nos yeux ne sont pas significatives. Il sagit de la « proportion denfants dans le ménage », de la « soudure », de « lapport extérieur au ménage ». Nous nous attendions à un effet important de la «soudure » sur lémigration. Cest peut-être dans lintensité que résident les différences. Il aurait fallu, non pas se contenter du fait que le ménage ait connu ou pas la soudure, mais mesurer lintensité de cette soudure. Concernant lapport extérieur, nous avions formulé lidée que lapport extérieur pouvait être un facteur de frein à lémigration à partir du moment où le ménage bénéficie dun appoint. Ici non plus cet apport nest pas quantifié. Nous ne disposions daucune information sur sa provenance ni sa fréquence. Mais la non significativité de certains résultats, doit être, à notre avis, liée aussi à la taille de l'échantillon qui est assez petite (505 ménages). Mais qui émigre des ménages ?Proportionnellement, ce sont les enfants des chefs de ménage qui ont émigré le plus (tableau 3). Les chefs de ménage ou leurs conjoints sont les personnes qui ont émigré le moins, résultat somme toute logique car étant chef de ménage leurs responsabilités les retiennent sur place. Ce qui est par contre assez contre-intuitif, cest la faible migration des autres parents et non-parents. Dans notre approche théorique, nous avons avancé lidée que les personnes les moins liées au ménage, cest-à-dire ayant un lien de parenté éloigné avec le chef de ménage, seraient plus portées à émigrer. Cette hypothèse semble infirmée puisque ce sont au contraire les personnes les plus liées au chef de ménage, cest-à-dire ses enfants, qui ont émigré le plus. Si les enfants ont le plus émigré, est-ce parce quils sont des descendants directs du chef de ménage ou est-ce parce que simplement ils sont jeunes ? En dautres termes, est-ce le facteur lien de parenté ou le facteur âge qui est lélément déterminant ? Les autres descendants du chef de ménage, qui sont en fait les petits-enfants, neveux, nièces, donc de même génération, sinon plus jeunes que les enfants du chef de ménage, ont moins émigré que ces derniers. Donc, le facteur lien de parenté semble expliquer la migration prépondérante des fils du chef de ménage. En effet, les résultats montrent que ce sont les jeunes qui émigrent le plus dans les ménages (11,5% des enfants du chef, 8% des autres descendants du chef). Mais parmi ces jeunes, les fils du chef de ménage ont une propension migratoire plus grande. Ce résultat pourrait signifier que la migration des individus relève dune stratégie. Car si le migrant doit être une ressource du ménage, il faut quil soit une personne ayant des liens assez fort avec le ménage pour respecter le contrat qui le lie au groupe et les arrangements convenus avant son départ en migration. Tableau 3 : Répartition des individus du ménage âgés de 15 ans et plus selon leur lien de parenté avec le Chef de Ménage et leur statut migratoire
Source : enquête ménage dans la région du Sud-Ouest et du plateau Mossi : 1995 ConclusionDans cette analyse nous nous sommes tenus exclusivement aux caractéristiques du ménage, en ignorant volontairement les caractéristiques individuelles des membres. Quand bien même certaines sont quelques fois prises en compte (caractéristiques du chef de ménage, résidents ayant déjà émigré etc.), elles ont été utilisées pour caractériser le ménage dans sa globalité et non pour différencier les individus au sein du ménage. Naturellement les déterminants de lémigration agissent également au niveau micro et macro ; mais nous avons privilégié lanalyse au niveau intermédiaire, cest-à-dire, celui des ménages, car la décision de migrer est aussi influencer par lenvironnement du ménage, voir familial. Cette analyse a montré que les caractéristiques du ménage exercent une influence sur les départs des membres du ménage, même si dans l'ensemble cet effet nous semble assez faible par rapport à nos attentes. Il y a lieu cependant de nuancer cette conclusion car la nature des variables utilisées pour cette analyse mérite quelques observations. Une donnée importante qui est absente est la situation économique des ménages (production annuelle des ménages, les revenus annexes etc), qui est un des facteurs les plus déterminants dans lexplication des émigrations. Cette information a été saisie de manière indirecte par la connaissance de la soudure et lapport extérieur au ménage. Ces deux indicateurs sont insuffisants pour caractériser les conditions économiques des ménages. Une meilleure prise en compte de cette dimension aurait certainement permis davoir une mesure plus exacte de leffet réel des caractéristiques économiques du ménage. La petite taille de léchantillon est un facteur limitant de lanalyse, qui na pas souvent permis de répondre à toutes les interrogations. Des résultats non significatifs dans le modèle statistique peuvent être liés à la taille de léchantillon, alors quen réalité la variable a un effet sur le phénomène. Mais les problèmes de ce type danalyse cest la difficulté de trouver de grandes enquêtes sur la situation économique et migratoire des ménages. Cette analyse reste exploratoire et a permis, malgré les contraintes de léchantillon, de dégager quelques tendances sur les déterminants familiaux de lémigration rurale au Burkina Faso. [1]Il s’agit de l’enquête effectuée par le Centre Voltaïque de Recherche Scientifique (CVRST) et l’Institut National de la Statistique et de la Démographie (INSD) sous la direction de Coulibaly S., Gregory J., et V. Piché. Elle est une des enquêtes la plus importante depuis les indépendances en raison de la taille de l’échantillon (93000 individus) et de par la qualité du questionnaire. [2] Cette enquête nationale a été effectuée par l’Institut National de la Statistique et de la Démographie (INSD). Trois types de questionnaires ont été utilisés : le questionnaire ménage, le questionnaire migration et le questionnaire femme. Le nombre de ménages de l’échantillon pour le questionnaire ménage s’élève à environ 20000 dont 13400 en zone rurale, et à 10000 pour le questionnaire migration dont 6700 en zone rurale. [3] Cette enquête nationale biographique a été réalisée en 2000 par l’UERD, l’Université de Montréal et le Cerpod. Au total 8600 biographies ont été réalisées. [4] Les institutions de huit pays d’Afrique de l’Ouest, sous la coordination du CERPOD, ont réalisé la même enquête à la même période (1993). L’échantillon du Burkina Faso comportait 10100 ménages et 4700 biographies migratoires. [5] Marchal (1985), dans le cas du Plateau Mossi constate que sur quatre années successives, on compte une année de très mauvaises récoltes (année de disette généralisée), une mauvaise (la production ne satisfait pas les besoins, avec des pointes de famine durant les mois de juin et juillet), une médiocre et une bonne qui peuvent octroyer une quantité de grains acceptable. [6]Jusqu'à présent et à notre connaissance, aucune étude n'a révélé l'existence de stratégie d'intensification agricole au Burkina. Seules les superficies aménagées dans la vallée du Kou, dans la plaine de Banson et dans le Sourou, par l'Autorité de l'Aménagement de la Vallée des Volta, sont l'objet de cultures intensives. [7]L'image d'une famille africaine unie et monolithique est souvent plus un mythe qu'une réalité car des conflits d'intérêts entre individus existent au sein des ménages et ont un effet sur les stratégies migratoires. [8] Pendant la saison morte qui dure jusqu’à 6 mois, et parfois plus dans certaines régions du nord, si les personnes valides migrent (migration saisonnière), même si elles ne rapportent rien de leur migration, cela aura été des bouches en moins à nourrir, d’ou une économie de vivre. [9]La concession est un paquet de logements, souvent entouré par une enceinte, et qui abrite plusieurs ménages distincts, chacun occupant un ou plusieurs logements selon sa taille. Elle peut recouvrir des formes et des tailles différentes selon les lieux et les usages. Dans le Sud-Ouest, c’est généralement une grande maison en terre battue, avec plusieurs sorties (une sortie pour chaque ménage), alors qu’en pays Mossi, c’est plutôt de petites cases rondes contiguës, en chaume, reliées ou pas par une clôture. Cette unité d’habitation est la « zaka » en pays Mossi et le « So » dans le Sud-Ouest. Le rôle réel ou symbolique du chef de concession (« zaksoba » et « sotigui ») est fonction de ses liens de parenté avec les chefs des ménages co-résidents, les ménages de la concession étant indépendant. [10] Ces informations sont de natures variées. L’ancien migrant indique au futur migrant les points de chute, les réseaux à activer une fois arrivé à destination, les filières d’emploi, etc. L’étude de Capron et Kholer (1975) sur les migrations burkinabé en Côte d’Ivoire montre que les migrants originaires d’un même village ont tendance à avoir une même destination (une même ville) ou un même quartier dans les grandes villes comme Abidjan. [11] Cette définition ne serait pas opérationnelle en milieu urbain, où l'unité de production est un non-sens. En milieu urbain les lieux d'activités et la nature de ces activités sont divers. Les éléments les plus importants à prendre en compte certainement sont l'unité d'habitation, la résolution en commun des questions principales (nourriture, santé, etc..). [12] Le village est la plus petite entité géographique administrativement reconnu au Burkina. [13] Le composant nucléaire est l’unité composée du couple et des enfants non mariés BIBLIOGRAPHIE
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