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Union of African Population Studies / L'Union pour l'Etude de la Population Africaine

Num. 9, 1994
Untitled Document

Union for African Population Studies, Rapport de Synthese / Summary Report, Numéro/Number 9, Sept. 1994

PROGRAMME DE PETITES SUBVENTIONS POUR LA RECHERCHE EN POPULATION ET DEVELOPPEMENT

ACCROISSEMENT PERI-URBAIN DANS UNE VILLE DU TIERS-MONDE
le cas de la banlieue Ouest de Brazzaville

DOBINGAR Allassembaye

Etudiant au Département de Géographie, Université de Tchad Ndjaména

Etude réalisée dans le cadre du programme de petites subventions pour la recherche en population et développement financé par le crdi, la fondation roc kfeller, la fondation mac arthur, la sarec et le ministère français de la coopération

Code Number: uaps94008

RÉSUMÉ

Depuis une trentaine d'années, l'explosion démographique de Brazzaville est telle qu'elle a engendré une extension spatiale sans précédent de la ville. De 1960 à 1988, la population de la ville est passée de 100.000 à plus de 600.000 habitants. Dans le même temps, sa superficie s'est accrue de 1800 à plus de 12.000 hectares. Cette explosion urbaine s'est faite au détriment des villages ruraux environnants que la ville a progressivement "phagocytés".

L'urbanisation des zones rurales périphériques s'est faite par un "mitage" de l'habitat et des activités. En effet les activités rurales furent progressivement remplacées par des activités informelles et les petits métiers caractéristiques des villes du Tiers-Monde. De même pour l'habitat, de grandes maisons aux toits de tôles remplacèrent les petites cases rurales.

Cette péri-urbanisation s'est faite par la migration des anciens citadins des quartiers centraux vers les nouvelles extensions. Elle a été favorisée par les propriétaires fonciers coutumiers qui ont accepté de morceler et vendre leurs terres claniques suite à une forte demande de terrains à bâtir des citadins. Cette urbanisation n'a donc pas été contrôlée par la puissance publique et s'est faite dans une anarchie presque totale.

Cette "urbanisation" anarchique a engendré de nombreux problèmes:

  • Sur le plan de l'occupation de l'espace, elle a entraîné une érosion rapide des sols constitués de sables friables. Pour ce qui concerne le foncier, elle s'est traduite par de nombreux conflits entre vendeurs et acheteurs ou entre acheteurs à cause de l'absence de toute base cartographique matérialisant les implantations.
  • Quant aux équipements, leur insuffisance est telle que les habitants sont obligés de recourir quotidiennement aux quartiers centraux pour satisfaire presque tous leurs besoins.
  • Sur le plan social enfin, l'affluence trop rapide de gens d'origines socio-géographiques diverses a provoqué de nombreux conflits de cohabitation dans la population.

Les nombreuses difficultés que rencontrent les habitants des quartiers périphériques auraient pu être évitées si les pouvoirs publics avaient appliqué les mesures contenus dans le plan d'urbanisme adopté en 1980. Malheureusement, ce fut pas le cas et aujourd'hui, ce document est dépassé sans avoir connu un début d'exécution. Pour remédier à la situation, il faudrait adopter une politique urbaine dénuée de tout sentimentalisme et qui viserait d'abord l'intérêt de la collectivité. Ce n'est qu'ainsi que l'on peut espérer résoudre ce problème qualifié aujourd'hui de pathologique.

INTRODUCTION

Dans les pays en voie de développement l'urbanisation commence à poser de sérieux problèmes qui vont en s'amplifiant. En effet, l'accroissement rapide de la population des villes y a entraîné de nombreuses difficultés. Ces pays n'ont cependant pas suffisamment de ressources pour les résoudre. Ces problèmes sont de divers ordres: logements, transports, emploi, assainissement, etc... Ils interpellent aussi bien hommes politiques que chercheurs qui, chacun selon ses compétences, doivent en chercher les causes pour en trouver les solutions les plus appropriées.

En effet, l'absence de maîtrise de la croissance interne de nos villes a abouti, aujourd'hui, à une situation de sous-intégration chronique caractérisée par l'apparition de taudis et de bidonvilles. En dehors du centre-ville dont l'aménagement a été conçu depuis la colonisation, les nouvelles extensions se développent comme des "entités à part", sans moyens de gestion autonome. Brazzaville est un bon exemple de ville dont le développement dépasse toutes les prévisions.

En choisissant le thème "Accroissement péri-urbain et intégration au système socio-économique dans une ville du tiers-monde, nous avons voulu, à travers ses manifestations les plus récentes, comprendre les implications pratiques de cette urbanisation rapide et proposer des solutions en fonction des réalités du terrain.

Problématique

Depuis une trentaine d'années, l'urbanisation de l'Afrique, en général, et celle de l'Afrique tropicale en particulier, s'est considérablement accélérée. Région à tradition presqu'exclusivement rurale, mises à part quelques exceptions en Afrique occidentale et orientale, l'Afrique noire est entrée dans la "civilisation urbaine" avec la colonisation (VENNETIER, 1976). En 1920, la population urbaine ne représentait que 2,5 % de la population totale du continent. En 1960, ce pourcentage est passé à 24 % et en 1980, il dépassait 40 % (Ankerl, 1983). Si au niveau continental le taux actuel d'urbanisation est pourtant faible, il cache en réalité de grandes disparités régionales et nationales. Citée parmi les pays les plus faiblement peuplés du continent, la République populaire du Congo, avec 65 % de la population agglomérée dans les villes, est cependant l'un des pays les plus urbanisés d'Afrique. A elle seule, Brazzaville rassemblait en 1984, près du tiers de la population totale du pays.

Le tableau N° 1 montre l'évolution de la population des quatre communes urbaines du pays et l'ensemble du territoire.

Tableau N° 1: Evolution de la population des quatres premières villes

congolaises.

LOCALITES

ANNEE

T.A. annuels %

 

1974

1984

 

Brazzaville

321.403

585.812

6,2

Pointe Noire

156.105

294.203

6,5

Loubomo

28.577

49.134

5,6

Nkayi

28.957

36.534

2,4

Congo

1.319.790

1.909.248

3.8

Source: R.G.P. 1974 et R.G.P.H. 1984, C.N.S.E.E.

Ce tableau établit la prééminence de Brazzaville dans l'explosion urbaine. Mise à part Pointe Noire dont le poids démographique approche celui de la capitale, les autres villes ne sont que des centres urbains secondaires qui ne concurrencent aucunement la suprématie de la capitale. Il s'agit là d'une bicéphalie caractéristique des pays sous-développés. Cette bicéphalie résulte de l'accaparement par la capitale de tous les investissements et de la plupart des activités, créant ainsi un vide économique dans le reste du pays. La capitale subit une pression démographique telle qu'il s'ensuit une explosion démographique. La ville attire alors les migrants des confins mais aussi hors des frontières nationales. L'explosion démographique de Brazzaville est imputable à un exode rural massif qui dépeuple les campagnes et un accroissement naturel élevé de la population urbaine.

Cet accroissement démographique de la capitale est accompagné d'une extension spatiale sans précédent. Le développement spatial de la ville a, depuis plus d'une quinzaine d'années, débordé le périmètre urbain originel et se fait maintenant sur l'espace rural environnant qu'elle ne cesse de "phagocyter" (voir Figure n° 1).

La forte croissance spatiale est due à la pression démographique et à la nécessité pour les citadins de se loger. En effet, les politiques urbaines de Brazzaville sont parmi les moins restrictives de la région, la puissance publique étant non seulement absente du domaine foncier, mais elle répugne à pratiquer l'urbanisme au bulldozer comme à Kinshasa ou Abidjan. A Brazzaville, le développement des quartiers périphériques a été l'oeuvre des propriétaires fonciers coutumiers en dehors de tout contrôle de l'Etat et des collectivités locales. Il a été favorisé par les problèmes de logements qui ne cessent de s'aggraver. En effet, l'incapacité de l'Etat et des sociétés immobilières de satisfaire la demande de logements des citadins, la saturation des anciens quartiers et la spéculation foncière qui s'en est suivie, les coûts élevés du niveau de vie qui a entraîné l'augmentation des coûts du loyer..., sont autant de raisons qui ont favorisé le développement spatial de la ville.

Les propriétaires coutumiers des villages environnants ont été responsables de ce développement spatial. Ce sont eux qui ont accepté de morceler leurs terres ancestrales pour les vendre aux demandeurs venus de la ville, afin y construisent leurs logements. Il en est résulté une augmentation spectaculaire de la superficie de la ville. De 1960 à 1980, elle est passée de 1.850 hectares à 7.200 hectares. En 1988 elle aurait largement dépassé les 12.000 hectares sans que les pouvoirs publics n'aient pu faire quoi que ce soit en 1988.

Dans le vécu quotidien, le développement quasi spontané des nouveaux quartiers sur ces espaces anciennement ruraux, a engendré de nombreux problèmes leurs occupants.

Lorsque nous avons entrepris cette étude, nous nous étions fixé comme objectifs de chercher à savoir comment s'est formé cet espace, quelle est son évolution actuelle et comment l'intégrer au système urbain. Pour cela, nous nous étions posé les quatre questions fondamentales suivantes:

  • Comment l'espace urbain a-t-elle phagocyté l'espace rural?
  • Comment vivent les habitants?, quelles sont leurs activités? Quelles sont les interrelations entre ces quartiers et les quartiers centraux?
  • Quels sont les problèmes qu'entraîne l'occupation anarchique des terrains?
  • Que faire pour résoudre globalement le problème?

Pour répondre à toutes ces questions, nous avons choisi un secteur d'occupation urbaine récente. Cette zone est située à l'extrême ouest de la ville, après la rivière Djoué qui marquait encore la limite officielle d'agglomération jusqu'en 1985. Elle s'étend de part et d'autre de la route nationale n° 1 sur environ 7 km de longueur et sa largeur varie de 100 à 800 m par endroit. Sa superficie avoisine 826 hectares et la population était évaluée à 5.333 habitants au recensement de 1984. Ce sont d'anciens villages qui ont été progressivement urbanisés et qui illustrent parfaitement les mutations qui s'y sont produites.

Pour répondre aux questions que nous avons posées, nous avons décidé d'étudier:

  • Les lotissements: nous voulions connaître, dans ce volet, comment on en était arrivé à morceler les terres coutumières qui n'étaient pas traditionnellement aliénables.
  • Les équipements et les activités: nous avons fait l'inventaire des équipements et des principales activités pratiquées dans la zone, pour mesurer le degré d'insuffisance et les mutations qui se sont produites.

Figure 1: Evolution spatiale de Brazzaville (1950-1985)

  • La population et ses activités: nous cherchions à connaître l'origine des habitants de la zone, les raisons de leur installation dans la zone, leurs activités quotidiennes et les rapports qu'ils entretiennent avec le reste de la ville.
  • Les problèmes auxquels sont confrontés les habitants: notamment les problèmes posés par l'occupation anarchique du milieu naturel; les problèmes économiques, en particulier l'accès aux biens et services qu'offre la zone à ses habitants; les problèmes sociaux qu'ils rencontrent dans leurs rapports de tous les jours.

L'explosion démographique est sans aucun doute à l'origine de l'extension spatiale et des divers autres problèmes que connaît la ville. Cependant, parmi les causes majeures, il faut également compter la nécessité pour les citadins de se loger face à l'augmentation du coût de la vie ainsi que la spéculation foncière dans les anciens quartiers. C'est donc parce qu'ils ne pouvaient pas compter sur l'Etat pour résoudre ces problèmes, que certains citadins se sont tournés vers la périphérie.

Méthodologie

Pour faire cette étude, nous avons combiné plusieurs techniques de recherche à savoir l'observation sur le terrain, la recherche documentaire, les enquêtes par questionnaire et les entretiens pour la collecte des données.

L'observation

Elle fait partie des techniques de recherche utilisé en géographie. Elle permet non seulement de se familiariser avec le terrain, mais aussi de s'intégrer au milieu que l'on veut étudier pour mieux le connaître. Elle a commencé bien avant que nous n'ayons défini avec exactitude notre thème et elle s'est poursuivie jusqu'à ce que nous ayons fini de rédiger notre rapport d'étude. Elle nous a donc permis de connaître la population, ses habitudes, son comportement et les problèmes auxquels elle est confrontée. Nous avons profité de ces occasions pour nouer des relations qui nous ont été d'une grande utilité lors des enquêtes. Elle a enfin été fondamentale pour la rédaction de la première partie de notre travail.

La recherche documentaire

Elle a porté sur différentes sources.

- La recherche bibliographique

C'est la partie la plus ardue mais une étape fondamentale de ce travail car elle nous a permis de circonscrire notre sujet et d'affiner nos outils méthodologiques.

Bien que ce soient la ville et les problèmes urbains qui avaient le plus retenu notre attention, nous avions également consulté de nombreux ouvrages de sciences humaines et sociales ainsi que de nombreuses publications sur les **** de méthodologie. S'agissant des villes, les communications présentées lors du colloque de Talence à Bordeaux en 1972 sur la Croissance urbaine en Afrique noire et à Madagascar et celles du séminaire de Lomé sur le même thème nous ont apporté de précieux renseignements sur les problèmes d'urbanisation en Afrique noire. De nombreux ouvrages et travaux de l'O.R.S.T.O.M. et des éditions Karthala nous ont également guidé dans ce sens. En plus des ouvrages purement géographiques, les publications en urbanisme et aménagement urbain dans le reste du monde et particulièrement en Europe occidentale, nous ont permis de nous faire une idée de la question dans les pays qui ont pu maîtriser la croissance de leurs villes.

La connaissance des données sur Brazzaville et la collecte des informations dont nous avons besoin, ont été facilités par l'existence de quelques travaux de base sur la ville. Nous mentionnons, entre, autres les recensements de la population de 1974 et 1984, les documents d'urbanisation adoptés en 1980 et les travaux du colloque de Brazzaville de 1986.

- L'analyse des photographies aériennes

Elle a consisté en l'interprétation d'une série de missions de photographies aériennes concernant la ville et datant de 1951. Cette photo-analyse nous a permis de suivre l'évolution de l'occupation spatiale sur trois décennies. Certaines cartes figurant dans les pages qui suivent, ont été élaborées à partir de ces photos qui, en l'absence de cartes officielles récentes sur la zone, sont les seuls éléments permettent de se faire une idée de cette évolution.

- L'analyse des cartes

Elle a contribué, au même titre que la photo-interprétation, à la connaissance des faits et phénomènes spatiaux. Il s'agit notamment de la carte topographique de 1957 sur la zone et des cartes accompagnant les documents d'urbanisme qui nous ont fourni de nombreuses informations pour la rédaction d'une bonne partie de ce travail.

L'enquête sur le terrain

Elle comprend les enquêtes par questionnaire et les entretiens.

- L'enquête par questionnaire

Nous l'avons divisé en deux parties, la première porte exclusivement sur les ménages et la seconde sur les activités économiques.

- L'enquête sur les ménages

Elle a été faite à partir d'un questionnaire destiné aux chefs de ménage. Ce questionnaire contient toutes les informations concernant le chef de ménage, à savoir son identification, ses activités, ces distractions ainsi que son statut d'occupation du sol. Il est accompagné d'une fiche d'identification qui permet de connaître l'âge, la date de naissance, le sexe, la profession et le lien de parenté avec le chef de ménage, de tous les membres du ménage.

Au recensement de 1984, cette zone comptait 5.333 habitants répartis dans 1.125 ménages. Aussi, c'est en fonction de cette population globale que nous avions arrêté la taille de notre échantillon à 220 ménages, soit un taux de sondage de 20 % environ. Cependant, il a été particulièrement difficile de choisir les ménages devant être enquêtés compte-tenu de l'inégale répartition des constructions et surtout du grand nombre de maisons non habitées. L'implantation, plutôt disparate, des constructions dans l'espace a été un obstacle de taille lors du choix de parcelles à enquêter à partir de la photographie aérienne, car il est impossible de savoir sur la base de la seconde photo si une maison est occupée ou non.

C'est la raison pour laquelle nous n'avions pas pu définir à l'avance une technique précise respectant un espacement régulier ou encore celle utilisant les probabilités. En conséquence nous avons adopté la méthode du choix raisonné, en essayant de respecter au mieux la structure de la population. Selon la***** sociale à travers les divers types de logement que l'on a trouvé sur place. Le logement était apparu comme un bon indicateur du niveau social de l'individu et nous en avons tenu compte pour choisir nos ménages à enquêter. Notons toutefois qu'un effort particulier avait été fait pour respecter la répartition socio-professionnelle du recensement.

- L'enquête sur les activités

Elle a été menée grâce à deux petits questionnaires portant l'un sur les activités primaires et secondaires et l'autre sur les activités tertiaires. Cette enquête n'a concerné que les activités qui nous étaient apparues comme les plus importantes. Nous en avons exclu les micro-commerces de détail tenus par les ménagères et qui n'ont généralement pas d'emplacements fixes. L'objectif visé par cette opération était de déterminer la durée d'installation de ces activités, leur impact social, et leurs perspectives d'avenir.

- Les entretiens

Nous les avons voulus très ouverts. Elles ont eu lieu avec les responsables des quartiers, les personnes âgées tout comme les jeunes. Avec les chefs de quartiers, nous avons discuté des problèmes généraux, notamment les problèmes qu'ils rencontrent dans la gestion quotidienne des affaires. Les personnes du 3è âge nous ont été très utile dans la reconstitution de l'histoire de la zone en l'absence de sources écrites précises. Les entretiens avec les jeunes ont surtout eu lieu sous forme de discussion de groupe Ils nous ont permis de nous faire une idée de leurs aspirations et des problèmes qu'ils rencontrent. Notons enfin les multiples conversations anodines, apparemment désintéressées, que nous avions, à chaque fois que nous allions dans la zone, et qui nous ont apporté des compléments d'informations indispensables à l'achèvement de ce travail. Le dépouillement et l'analyse des résultats ont été faits d'abord manuellement puis au micro-ordinateur.

Par rapport à nos objectifs et selon les questions que nous nous étions posées au départ, nous avons divisé notre travail en quatre parties qui sont les suivantes:

  • Une première partie qui présente les transformations qui ont accompagné cette rapide péri-urbanisation;
  • La deuxième partie donne les causes de cette extrême péri-urbanisation;
  • La troisième partie étudie les problèmes entraînés par cette forte péri-urbanisation.
  • Enfin, la quatrième partie analyse les politiques urbaines pour Brazzaville et formule des suggestions de réaménagements.

Les transformations issues de cette rapide urbanisation

L'urbanisation rapide est matérialisée par des mutations sur tous les plans.

- Les changements les plus importants sont ceux liés au régime foncier car l'appropriation est devenue individuelle, ce qui n'était pas le cas originellement dans ces anciens villages. En effet, comme dans la plupart des sociétés traditionnelles d'Afrique noire, à Brazzaville la terre qui était propriété collective, appartenait à quelques clans des tribus kongo et lari venues des régions de Kinkala et de Boko à la fin du siècle dernier (SAUTTER, 1966). Les chefs de terre n'étaient que des gérants communautaires et les occupants des usufruitiers. Nul n'avait le droit de se l'approprier ni de l'aliéner. Chacun des habitants pouvant l'exhiber et jouir librement des fruits issus de son travail (PIERMAY, 1983 et 1989).

Cette pratique, courante en Afrique noire a commencé à subir des modifications avec la colonisation, au milieu des années 1940. En effet, selon nos enquêtes, c'est à partir de cette époque que l'administration coloniale octroya à des colons français des concessions pour la création de fermes. Mais comme les droits des communautés traditionnelles étaient officiellement reconnus, l'administration obligea les bénéficiaires de l'opération à indemniser les chefs à qui les terres avaient été ravies.

Est-ce ce geste qui fit comprendre aux chefs coutumiers l'intérêt qu'ils pouvaient tirer du capital que constitue la terre? Nous ne pouvons pas l'affirmer. Toutefois, c'est à partir de cette époque que commença la spéculation foncière. Les premiers nationaux à acheter des parcelles le firent à partir de 1949. Selon les résultats de notre enquête recueillis, 7 % des chefs de ménages enquêtés ont achetés leurs parcelles de terrain entre 1949 et 1959; 28,9 % entre 1960 et 1969; 46,9 % entre 1970 et 1979 17,2 % entre 1980 et 1985 (fig. n° 2).

Figure n° 3: Date d'achat des terrains dans la zone.

De nos jours, près de 80 % des ménages occupent des parcelles qu'ils ont achetées alors que les natifs ayant hérités des terrains qu'ils occupent représentent à peine 15% . Les chefs coutumiers ont littéralement morcelé toutes leurs terres ancestrales et les ont vendues aux citadins venus chercher des terrains pour construire leurs logements. Ils ont ainsi trouvé des sources de revenus faciles qu'ils pensaient inépuisables. De ce fait, ils ont fini par vendre toutes leurs terres et, aujourd'hui, il ne reste plus une parcelle de terrain libre. Actuellement, les transactions foncières sont surtout le fait des revendeurs.

L'évolution de cette occupation des terres est illustrée par les photographies aériennes (figure 3). Cette évolution est également perceptible à l'analyse de l'enquête au cours de laquelle nous avions demandé aux enquêtés l'année de leur arrivée dans le quartier. Ainsi, si nous excluons les natifs, 23,4 % des migrants furent arrivés dans la zone avant 1970; 19,4 % entre 1970 et 1979; et 56,7 % entre 1980 et 1988. En huit années, il est arrivé plus de personnes qu'au cours des quarante années précédant la décennie 1980. L'ampleur de ce mouvement et son accélération expliquent bien l'importance de l'extension péri-urbaine à Brazzaville.

Cette extension frappant à réaliser sur le terrain s'est le changement du mode d'occupation de l'espace. Les noyaux villageois se sont agrandi rapidement à partir de 1970; les champs disparurent pour faire place aux constructions qui, elles aussi, évoluèrent. Les cases traditionnelles aux murs en pisé et toits de chaume firent place aux maisons en briques adobes ou en parpaing et toits de tôles. Actuellement, 54,5 % des maisons ont des murs en parpaing et 36,9% en briques adobes (terre battue) alors que le pisé (argile séché dans une structure de branchage) a presqu'entièrement disparu.

Figure n° 3: Occupation de la zone en 1951-52 et en 1986

Ces changements se sont répercutés également sur les activités avec notamment la disparition des activités rurales. Les champs disparurent tout comme les jardins maraîchers qui jusqu'à la fin des années 1960 étaient exploités pour ravitailler la ville. Aujourd'hui ces exploitations se limitent à quelques secteurs de vallées. La situation n'est pas meilleure pour les fermes avicoles qui ont presque toutes périclité.

Par contre, d'autres types d'activités connurent un développement plus ou moins rapide. C'est par exemple le cas des activités du secteur secondaire représenté par les carrières et les industries de concassage. Celle-ci, bien qu'actuellement en crise, changère progressivement la physionomie de la zone depuis le début des années 1960. Il en est de même des activités informelles et des petits métiers qui connurent une véritable expansion au cours des années 80. D'après les résultats de notre enquête 73,3% des ateliers du secteur informel ont été créées après 1987 dont 40 % au cours du premier semestre 1988. On trouve dans ce secteur des magasin d'alimentations (8 %); des kiosques (petits commerces tenus en micro-détail dans des abris faits en contreplaqués) (22,5%); de petits ateliers de couture, de menuiserie, de réparation de voitures, de vulcanisation de pneu et de recharge de batteries, des salons de coiffure.

Les activités de loisir ne sont pas absentes avec notamment les nombreux bars, les dancings et les Nganda (bistrot-restaurant) représentant 26,7 % des activités du secteur informel. Dans la zone on trouve également trois hôtels dont un de trois étoiles. Le commerce de vin de palme (Nsamba) est aussi très répandu dans les quartiers périphériques. Quant aux activités sportives, elles sont réduites au "Mwana-foot" (littéralement football des enfants) dans la cour des écoles.

Sur le plan démographique on note également un changement par rapport à l'origine socio-géographique. En effet, la population est maintenant constituée en grande partie de migrants alors que les natifs ne forment plus qu'une minorité. Le changement de la répartition ethnique qui s'en est suivi fait cohabiter des autochtones Kongo et Lari et d'autres ethnies du Sud du pays ainsi que des étrangers dont la majorité sont des Zaïrois. Ce changement est une preuve supplémentaire de l'urbanisation de la zone qui est passée d'une zone rurale, ethniquement homogène, à des quartiers urbains multi-ethniques. Cette urbanisation s'est faite par une migration massive de citadins des anciens quartiers vers ces nouvelles extensions. Le tableau n° 2 montre le mode de peuplement de la zone étudiée (répartition des habitants) selon l'origine géographique et la date d'arrivée.

Tableau n° 2 : Date d'arrivée dans le quartier et résidence antérieure

Rés. Antérieure

N.D

Date d'arrivée dans le quartier

TOTAL

%

 

 

Av.49

49-59

69-69

70-79

80-89

 

 

V/rég. Congo

0

0

10,5

0,0

7,7

7,9

13

5,8

Brazzaville

40

20

15,8

19,2

82,1

85,1

143

64,4 .

Etranger

0

5

0,0

7,7

0,0

2,6

6

2,7 .

Natif

0

50

21,1

26,9

0,0

0,0

21

9,5 .

Village

60

25

52,6

46,2

10,3

4,4

39

17,6 .

TOTAL

100

100

100

100

100

100

222

100

 

5

20

19

26

39

 

 

.

A/reg = A votre région du Congo

Source: Enquêtes personnelles

Ce tableau nous permet de constater un changement fondamental intervenu dans la composition de la population de la zone. Si nous considérons la venue des habitants selon les décennies, nous remarquons une rupture entre les décennies 1960 et 1970. Par exemple, jusqu'en 1969, si on exclut les natifs, il y a eu 44 arrivées dont 61,4 % du village et 27,3 % de Brazzaville. Par contre, à partir de 1970, les flux ont changé. De 1970 à 1988, il y eut 153 migrants dont 84,3 % venus de Brazzaville et 5,9 % du village. Différentes études déjà effectuées à Brazzaville (ANGLADE, ACHIKBACHE, 1986 et 1988) ont démontré que la croissance des quartiers périphériques n'est pas l'oeuvre des ruraux. Ces derniers s'installent d'abord dans les quartiers centraux chez des parents ou amis. Ce n'est que plus tard, une fois qu'ils se sont faits une situation, qu'ils entreprennent d'acheter une parcelle. Nous avons pu constater le même phénomène en demandant aux enquêtés la durée de leur installation à Brazzaville et dans le quartier actuel (figure 4).

Figure n° 4: Durée d'installation des chefs de ménage et dans le quartier.

Source: Enquêtes personnelles (1988)

La figure n° 4 illustre de ce phénomène de délolalisation intra-urbaine qui se traduit par la migration massive des gens des quartiers centraux vers les quartiers périphériques. En effet, la population de ces derniers quartiers est composée en majorité d'habitants qui ont d'abord vécu plus ou moins longtemps à Brazzaville alors que la proportion de résidents venus directement de la campagne est infime (tableau n° 3). L'installation de la plupart des migrants dans le quartier est postérieure à la date d'arrivée en ville.

Il apparaît ainsi à la figure n° 4 que la majeure partie des chefs de ménage (plus des 3/4) sont installés dans le quartier depuis + ou moins ans. La plus part de ces chefs de ménage sont dé....gui dans les quartiers peuplés depuis moins de 10 ans. Cette caractéristique a été également relevée par Marc PAIN à propos de Kinshasa (PAIN, 1984). D'autres études sur la ville l'ont déjà longuement mentionné, notamment les travaux de VENNETIER (1980), ACHIKBACHE et ANGLADE (1986 et 1988).

Ces citadins qui ont abandonné leurs quartiers anciens pour les nouvelles extensions ne sont pas toujours des gens de faibles conditions. Il s'agit le plus souvent de fonctionnaires et de salariés du privé (33,3 %), d'ouvriers et manoeuvres (23,4 %), de commerçants (6,8 %), de cultivateurs (14,9 %) et de retraités (9 %).

On trouve également, parmi eux, des universitaires (7,7 %) dont des professeurs d'université, des médecins, des cadres supérieurs, des gens ayant effectué des études professionnelles (16,7%) ou secondaires (20,6%). Les analphabètes ne représentent que 22,5 %. Ce pourcentage est faible si on tient compte du fait que ces quartiers ont été créés à partir d'un noyau constituant des villages traditionnels. Les chômeurs n'y représentent qu'environ 8 % des adultes. Plus de 80 % des chefs de ménage sont mariés ou vivent maritalement.

Une originalité frappante de ces quartiers périphériques est que ce ne sont pas des bidonvilles comme c'est habituellement le cas dans les villes des pays sous-développés. Les maisons y sont d'un bon standing (54,5 % des constructions sont en dur). Par endroits ces quartiers ont un aspect résidentiel indiscutable. Cette périphérie de Brazzaville s'est donc complètement transformé depuis une quinzaine d'années. Il s'est largement urbanisé. Quelle en ont été les causes?

Les causes de l'urbanisation

Les causes de la croissance péri-urbaine de Brazzaville sont multiples. Mais, de leur analyse, il apparaît la principale cause liée à l'acuité des problèmes du logement. En effet, malgré l'explosion démographique, les pouvoirs publics n'ont rien entrepris pour le constat de logements sociaux, ni contrôler les prix des loyers. Les brazzavillois sont abandonnés à eux-mêmes.

La saturation des quartiers anciens, provoque une forte spéculation foncière. Il en est résulté que les prix des loyers dépassent de loin la capacité des ménages de modestes conditions. Cette évolution a accru la précarité des conditions de vie de nombreux ménages. La combinaison de ces **** a amené les *** citadins à se tourner progressivement vers les zones périphériques où il était encore possible de trouver des terrains à un prix abordable. Lors de l'enquête, il est apparu clairement que la possession d'une parcelle de terrain est le voeux le plus cher de tous les chefs de ménages. Le graphique ci-dessous traduit bien cette option.

Figure n° 5: Statut d'occupation du sol avant et après l'installation dans la zone (1988)

Source: Enquêtes personnelles

La figure 1 montre qu'à peine 15 % de C.M. étaient propriétaires des maisons où ils vivent avant leur migration. Soulignons que la majeure partie d'entre eux était soit locataires ou hébergés ***. En revanche, actuellement plus de 90 % d'entre eux sont les propriétaires des maisons où ils vivent

Un ***, identique a été observé dans les autres villes africaines. Il traduit la spécificité du développement urbain sur le continent noire. En effet, l'acquisition d'une parcelle de terrain figure en première place dans l'échelle des valeurs citadines. C'est à la fois un signe de réussite sociale et une nécessité pour garantir la sécurité et la stabilité de résidentielle ce qui en fait le but avoué de tous les chefs de ménage n'ayant pas de logement qui lui appartient. Est-ce avec fierté que les enquêtés répondent aux questions concernant leur statut d'occupation et surtout les raisons de leur migration dans la zone. Selon les résultats de l'enquête 26,1 % ont quitté leur ancien quartier parce qu'ils y étaient locataires et qu'ils ont maintenant leur propre parcelle; et 14 % parce qu'ils vivaient chez les parents, cela donne en tout 40,1 % de gens qui ont déménagé pour vivre dans leur propre maison.

Les problèmes d'ordre familiaux viennent ou s'accompagnent des **** de ménage vers les zones périphériques. En effet, selon les résultats de l'enquête 14,4 % des chefs de ménage ont déménagé dans la zone étudiée pour ce motif. En effet, la société complexe étant une société matrilinéaire, la succession se fait non pas de père en fils mais d'oncle à neveu. Aussi, en cas de décès d'un chef de ménage ce sont les enfants de sa **** soeur qui sont les héritiers légitimes de ses biens. Les enfants chef de ménage sont tenus alors de libérer la concession de leur père.Malgré l'adoption d'un nouveau code de la famille congolaise, cette pratique persiste jusqu'à présent. Aussi, pour éviter ces problèmes à leur décès, les chefs de ménage qui ont les moyens préfèrent acheter des parcelles à leurs enfants même s'ils sont encore mineurs (PIERMAY, 1983).

Enfin d'autres causes ont également été cause de motif de ces migrations péri-urbaines pour les personnes enquêtées. Aussi, 10,4 % ont déclaré aussi migrer dans la zone pour suivre les parents, 7,2 % pour échapper aux vacarmes des quartiers anciens et 5,5 % pour des raisons de services.

Par ailleurs, la disponibilité des parcelles de terrain et leur prix relativement abordables sont app*** étant les seules raisons du choix de la zone étudiée par les migrants.

Le tableau n° 3 montre que la mobilité du prix des terrains a été déterminante dans le choix de la zone, du moins jusqu'à la fin des années 1970. En effet, 1945 et 1969, les prix les plus élevés ne dépassaient pas 50.000 F. La décennie suivant (1970 à 1979) a été une étape charnière au cours de laquelle se sont fait le plus grand nombre de transactions. Elle manque également le début de renchérissement des prix des parcelles de terrain (près de la moitié des terrains ont coûté moins de 100.000 F et l'autre moitié plus de 100.000 F avec des extrêmes dépassant 300.000 F). Cette tendance s'est accrue au cours des années 1980, la majorité des parcelles ayant été à plus de 200.000 F.CFA est resté dans une fourchette accessible aux petits revenus. Par ailleurs, les fortes hausses observés au cours des années 1980 s'explique à la fois par la spéculation engendrée par l'augmentation de la **** caisse que par le fait que la taille des parcelles a augmenté **** (figure 6).

Tableau n° 3: Evolution des prix selon les décennies unités: Franc C.F.A.

Prix terrains

ANNEES D'ACHAT

TOTAL

 

45-59

60-69

70-79

80-88

N.D.

 

3000-7500

22,2

25,0

0,0

0,0

0,0

11

7500-25000

44,4

36,1

11,9

0,0

12,5

25

25000-50000

0,0

27,8

13,6

4,5

25,0

21

50000-100000

0,0

2,8

23,7

18,2

12,5

20

100000-150000

11,1

0,0

11,9

9,1

12,5

11

150000-200000

11,1

0,0

10,2

4,5

0,0

8

200000-300000

0,0

5,6

15,3

22,7

12,5

17

300000-850000

0,0

0,0

10,2

36,4

0,0

14

Non déclaré

11,1

2,8

3,4

4,5

25,0

7

TOTAL

100

100

100

100

100

134

 

9

36

59

22

8

134

Source: Enquêtes personnelles

La figure n° 6 montre que la majeure partie des parcelles ont une taille comprise entre 400 et 600 m² qui représente le ***** pour l'habitation. De plus, le prix d'une parcelle ne semble pas être très lié à la dimension de la parcelle. L'évolution que nous fait voir ce graphique montre combien il était plus intéressant pour les citadins d'aller chercher des terrains à bâtir dans ces quartiers plutôt que dans les quartiers centraux où les prix se discutent à coups de millions de francs.

Figure n° 6: Répartition des terrains selon la superficie et le prix dans la banlieue Ouest (1988).

Source: Enquêtes personnelles

Enfin quelques enquêtés ont déclaré avoir choisi la zone étudiée pour d'autre motifs. Ainsi pour 17,5 % des enquêtés il s'agit tout simplement d'un retour au foyer après une longue absence; 16,7 % se sont installés pour suivre leurs parents, 14,4 % dans un moment sérieux, calme, *** (9 %). Toutefois, 3,6 % d'enquêtés ont reconnu être venues pour pratiquer une activité économique (jardinage, pharmacie, petit commerce).

Cependant, en plus de toutes ses considérations, il et évident que les migrants ont tenu compte de la donnée ethnique dans ce choix du quartier. En effet, en dehors des étrangers, près de 99 % de la population de Brazzaville est constituée d'ethnies du Sud dont environ 80 % sont originaires du Pool (Kongo, Lari, Soundi...). Le facteur ethnique a joué un rôle particulier dans le peuplement de Brazzaville dans la mesure où les originaires d'une même ethnie se regroupent habituellement au même endroit. Il en résulte que chaque quartier a sa dominante ethnique. Ceci est un facteur de cohésion interne du quartier mais aussi un frein au brassage ethnique, indispensable pour l'intégration des différentes ethnies.

L'absence de l'Etat dans le domaine foncier et immobilier urbain est, en grande partie, à l'origine du développement anarchique de la périphérie. Les pouvoirs publics ne contrôlent pas les terres à Brazzaville. En effet, les terrains vendus dans la zone de notre étude, 76,6% l'ont été par les propriétaires fonciers, 13,3 % par des revendeurs, 8,1 %; par le District et 3 % par les chefs de quartiers. De plus, les terrains vendus par le District sont des terrains qui avaient été saisis auparavant pour diverses raisons. Au lieu d'en faire des réserves pour des aménagements publics, le District les a revendus à des particuliers.

Par ailleurs, les pouvoirs publics n'ont développé aucun programme de projets sociaux, en dépit de la forte demande. Aussi, le parc immobilier de l'Etat n'est que de 1500 logements, soit à peine 2,8 % de l'ensemble du parc urbain. De plus, le prix de ces logements se chiffre à dizaine de millions de francs. Dans une telle situation, il est pratiquement impossible que l'Etat puisse exercer un quelconque contrôle sur le développement de la ville. Ceci d'autant plus qu'aucune restriction judiciaire n'est énoncée pour pallier ce manquement.

L'Etat n'a donc aucun poids sur le marché immobilier et foncier. Aussi, il revient aux citadins de résoudre eux-mêmes le problème de leur logement. Il n'est dès lors pas *** qu'ils se tournent vers les propriétés fonciers qui constitue la seule ***** pour eux. Pendant ce temps, l'Etat assiste passivement à l'extension du phénomène faute de pouvoir proposer mieux. Les brazzavillois ne semblent pas se plaindre de la situation outre mesure. Chacun fait des économies pour pouvoir se "lancer dans la mêlée", quitte à migrer vers les lointaines périphéries.

Le mode d'urbanisation sauvage explique l'extension spatiale considérable de la ville. Brazzaville croît surtout de façon horizontale. Il en résulté que les vieux quartiers sont déjà saturés alors que leurs densités ne dépassent pas 200 habitants à l'hectare. Faute d'avoir construit en hauteur l'on en est arrivé à une situation où la promiscuité est telle que la seule alternative est la migration vers la périphérie. Cependant, cette migration pose aussi des problèmes non moins sérieux.

Les conséquences de l'extension péri-urbaine

Même si la périphérie offre des logements à bon marché et beaucoup d'espaces, il n'en donne moins que habitats des quartiers périphériques sont confrontés à d'autres problèmes, autant plus sérieux. Il y a d'abord la dégradation de l'environnement, due à l'érosion. En effet, dans la périphérie les sols sont constitués de sables friables reposant sur des grés. C'est une structure fragile qui peut se dégrader facilement si elle subit d'importantes agressions. Son équilibre était assuré par la végétation qui constituait une protection contre les eaux de ruissellement. Or, depuis une quinzaine d'années, cette végétation est détruite progressivement par la construction d'habitation et des rues, sans que rien n'ait été fait pour protéger les sols. Cette situation est aggravée par le fait que les toits des maisons constitue de véritables réservoir de collecte des eaux de pluie et d'autre part que le relief de la zone (colline) qui accueillent la vitesse des eaux de ruissellement et par conséquent l'érosion. A cela il faut ajouter le danger que présente l'occupation des zones sensibles comme les bas-fonds et les talus qui constituent une menace pour les populations qui y habitent.

Aussi n'est-il pas rare que les rues et même les cours de maison soient **** pas de véritables racines ou bien que des maisons soient démolies par des éboulements de terrain. La persistance. Cette situation est bien la preuve du laisser-faire de la puissance publique. Il n'a même pas de P.O.S. (Plan d'Occupation du Sol) pour préserver les sites dangereux. Bien que la situation ne soit pas encore dramatique il y a déjà eu quelques cas de maisons écroulées sous l'effet de l'érosion et de l'éboulement de pentes.

Un second problème auquel les populations de la périphérie sont confrontées est l'absence de système de ramassage des ordures et d'évacuation des eaux usées. 46,4 % des ménages ici brûlent leurs ordures, (28,8 %) les enfouissent dans leurs parcelles, (9 %) les jettent dans la rue, (7,2 %) les transforment en fumier.

Ces initiatives ne peuvent résoudre défintivement le problème de l'accroissement des quartiers de ces zones. De plus, les enfouissement constituent un réel danger pour les constructions futures. Par ailleurs, les conflits fonciers sont fréquents dans la périphérie. Ils sont dus au fait que les lotissements sont effectués par le *** foncier, s******** ni caution de l'Etat. (ZIAVOULA, 1988). Ils opposent soit les acquéreurs entre eux, soit les acquéreurs aux propriétaires fonciers. Dans le premier cas, c'est l'imprécision des limites des parcelles qui est le plus souvent à l'origine de la confrontation. Cela conduit généralement les populations devant les instances politico-administratives locales. Celles-ci interviennent alors en dernier ressort pour trancher l'affaire en essayant de partager équitablement le terrain litigieux entre les plaignants. Le propriétaire foncier lui n'est pas inquiété, il a "encaissé" son argent et demeure étranger au conflit.

Dans le second cas, le problème est encore plus délicat. Il se pose lorsque le propriétaire foncier vend la même parcelle à plusieurs personnes. Lorsque le conflit éclate, ils se trouvent souvent dans l'incapacité de rembourser l'argent qu'il a reçu. Même s'ils arrivent à le faire, c'est au bout d'un temps relativement long, voire des années. Ces conflits qui finissent toujours à l'Arrondissement ou à la Justice, se perpétuent avec un silence complice de l'administration communale qui cautionne implicitement ces agissements en laissant faire.

En effet, bien que ces quartiers aient été lotis sans accord ni contrôle préalable de l'Etat, les bureaux des Arrondissements délivrent les permis d'occuper sans poser aucune enquête préalable (34,7 % de nos enquêtés ont un permis d'occuper et 21,1 % un permis de construire). Il en résulte que plusieurs permis d'occuper peuvent être délivré pour un même terrain. Cependant, malgré le nombre important de conflits de ce *****, aucune mesure sérieuse n'a été prise pour l'enrayer. Aussi, peut-on dire que le marché foncier à Brazzaville est "un marché où l'insécurité des transactions est la règle; la sécurité l'exception" (ZIAVOULA, 1988).

Il est évident que cette anarchie favorisée par l'administration et les services publics qui ne font pas respecter les textes officiels, car selon la Constitution de 1973, "la terre est Propriété du Peuple qui la gère par l'intermédiaire de l'Etat et nul n'a la droit de se l'approprier" (La constitution de la République populaire du Congo).

Un troisième domaine dans lequel les habitants de la périphérie sont pourtant défavorisé est celui des ******* , il n'en existe pratiquement pas dans cette partie de la ville. Les seules qu'on trouve sont deux écoles primaires (qui datent de l'époque coloniale) et un dispensaire installé en 1975 dans un bâtiment ayant fait l'objet d'une expropriation. Même la mise en place des *** des réseaux de distribution d'eau et d'électricité ont été pratiquement l'oeuvre des habitants. Les petits commerçants de micro-détail qui existent dans les quartiers pratiquant les prix beaucoup plus élevés que ceux pratiqués en centre-ville. Il n'y a pas de marché *** dans ce sens. Aucune action n'a été engagée par le Pouvoir pour éviter des aménagements urbains (route, égouts, ** public, aire de jeux, etc...).

L'absence d'équipements dans ces nouveaux quartiers constitue une véritable handicap sérieux pour les habitants. L'accès aux marchés de Brazzaville nécessite des dépenses supplémentaires de transport qui pèsent lourdement sur le budget des ménages.

Pour n'importe quel acte administratif, pour les soins sanitaires, pour se distraire, pour se cultiver il faut se rendre au centre-ville. Les élèves des lycées et collèges et les étudiants habitant la zone, sont obligés de parcourir des km, quelquefois à pied, pour rejoindre les établissements situés en centre-ville.

L'eau et l'électricité sont des denrées de luxe. Tous les quartiers situés à l'Ouest de Madibou ne sont pas encore desservis en eau.Aussi, le problème d'eau potable se pose avec acuité. Plus de 70 % des ménages sont encore obligés d'aller puiser leur eau de boisson à la source, parcourant pour certains plus de 3 km à pied (le tableau n° 4).

La corvée d'eau n'épargne personne ici, du petit garçon aux adultes des deux sexes. Cette corvée est d'autant plus ardue qu'il faut gravir des pentes en revenant de la source. Par ailleurs, l'augmentation rapide de la population de la zone fait que la capacité de certaines de ces sources est devenue insuffisante. Quelques unes, visiblement polluées, ont dû être abandonnées.

Les transports constituent également un problème aigu pour les habitants des périphéries. Parmi **** enquêtés, seuls 24,1 % disposaient d'un moyen de déplacement autonome (13,4 % de voitures et 11,7 % de deux roues), le reste sont obligés d'utiliser les transports en commun pour leur déplacement. Or, à cause de l'éloignement de cette zone et du mauvais état de la route menant à cette zone, les transports en commun officiels ne la desservent pas. Seuls les foula foula, assurent de vieux services de transport. Ces foula foula ******. Non seulement un aller simple coûte plus cher que dans les quartiers centraux, mais les foula foula n'ont pas le droit d'aller au-delà de ******. Aussi, les habitants qui désirent se rendre en ville sont obligés de payer 2 fois ********, soit au total 250 F par transport ou 500 F pour un aller-retour. Ceci ****** de 13.000 F ***** ou peut s'imaginer le poids que cela re*** ** le re*****. Au taux prohibitif des transports il faut ajouter les désagréments dus à l'insuffisance des "foula foula". Le matin, il faut être sur le bord de la route avant 5h30 pour avoir des chances de trouver un véhicule **** pour arriver en ville entre 7h 00. Leur ******** aux heures de pointe, les foula foula sont toujours surchargés (50 à 60 personnes pour une capacité de 30 à 35 places).

Tableau n° 4: Mode d'approvisionnement en eau et distance parcourue

M. APPROVIS.

Parcelle

D I S T A N C E P A R C O U R U E

<50m

50-100

100-500

500-1500

1500-3000

3000 & +

TOTAL %

Source

2,1

52,6

30,8

70,8

65,2

77,4

82,4

52,7

Abonnement

72,9

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

15,8

Sous location

0,0

26,3

7,7

8,3

0,0

0,0

0,0

4,5

Puits

25,0

15,8

7,7

4,2

2,2

0,0

5,9

9

Puits-source

0,0

5,3

53,8

16,7

32,6

22,6

11,8

18

%

100

100

100

100

100

100

100

100

T O T A L

48

19

13

48

46

31

17

222

Source: Enquêtes personnelles (1988).

Enfin, les fréquents excès de vitesse des foula foula provoquent souvent des accidents mortels.

Sur le plan social, cette rapide "péri-urbanisation" engendre souvent des conflits de cohabitation. Les natifs se sentent "envahis" par les étrangers, ce qu'ils supportent de plus en plus difficilement. Bien que les Lari et les kongo soient majoritaires dans ces quartiers, la plupart sont des "migrants" venus de la ville considérés comme des étrangers par les autochtones devenus minorité. D'autre part, la différence de niveau de vie entre les habitants suscite des conflits dus à la convoitise et à la jalousie (songui-songui).

Le désoeuvrement des jeunes est un autre mal dont souffrent des quartiers de la périphérie. De nombreux jeunes ont quitté l'école et sont sans fonction professionnelle la plupart d'entre eux semble désab**** et ****. Ils sont accusés par les adultes de verser dans le banditisme et la délinquance. On note également l'apparition de prostituées professionnelles, chose inconnue dans cette zone il y a encore quelques années.

Les habitants des quartiers périphériques sont également confrontés au problème de l'inhumation de leurs morts. En effet, comme ces quartiers sont très éloignés des morgues et des deux principaux cimetières communaux, le coût des obsèques y sont plus élevés. C'est pourquoi de nombreuses personnes préfèrent enterrer leurs morts dans leur parcelle ou dans les nombreux cimetières familiaux. Ces cimetières familiaux sont accessibles aux étrangers moyennant le payement de 50.000F. Cette pratique, prohibée par la commune, est encore fréquente. C'est pour y mettre un terme que le Comité de quartier a réservé, au Nord de la zone, un terrain pour y installer un nouveau cimetière. Toutefois, la commune n'a pas encore donné son accord officiel.

Les problèmes que connaissent ces quartiers sont inhérents à leur genèse. En effet, les villages ruraux étaient peu peuplés à l'origine. Il n'y avait donc pas de nécessité de les équiper. Mais, avec l'extension spatial consécutif à leur expansion démographique, il s'est rapidement posé le problème de la mise en place d'un minimum de structures de base. Cependant, l'Etat qui est le principal responsable des ***** civils n'était pas partie prenante dans cette urbanisation. Il a laissé faire jusqu'à présent. Mais, de nos jours les problèmes auxquels ces populations sont confrontées ont atteint une ampleur qui nécessite une ***** vigoureuse des pouvoirs publics. Ce serait une fuite devant ses responsabilités. Nous pensons qu'il est tant que les autorités se réveillent et qu'ils agissent avant que la situation n'atteigne un point de non retour car il sera alors trop tard. C'est une fuite devant les responsabilités que d'ignorer ces quartiers qui font bien partie de la ville et avec lesquels il faut compter. L'exemple du quartier Mfilou menacé de destruction par l'érosion est une bonne illustration des inconvénients que présente ce type d'urbanisation sauvage. Cette attitude est une preuve du manque de volonté de l'Etat à gérer correctement les services publics. Aussi, est-il indispensable que les pouvoirs publics adoptent une politique ferme d'urbanisation dénuée de tout sentimentalisme, une politique qui ait pour objectif premier l'intérêt de la collectivité. Dans cette perspective, il est nécessaire de lutter contre la corruption qui est l'une des causes principales de l'inefficacité des services publics.

Les politiques urbaines et propositions d'aménagement

La mise en oeuvre immédiate d'une véritable politique urbaine est indispensable pour résoudre les problèmes engendrés par l'extension péri-urbaine de Brazzaville. L'élaboration d'une telle politique suppose au préalable une analyse situationnelle *** les besoins et les contraintes. Par la suite, les mesures définies par cette politique devront être appliqués effectivement. Pourtant des outils techniques qui ne manquent pas dans le cas de Brazzaville.

En effet, il existe bien un Schéma Directeur (S.D.U.) et un Plan Directeur d'Urbanisme (P.D.U.), visant à organiser et planifier le développement de la ville. La production de ces documents dont la avait nécessité plus de deux années de travail par une équipe pluridisciplinaire. Ils contiennent des propositions pour l'organisation et l'équipement de la ville pour les vingt années à venir. Adoptés par l'Assemblée nationale en 1980 ils ont "force de loi" sur l'ensemble du périmètre urbain. Selon l'orientation, il était prévu dif. dans les plans de réaliser dans la zone périphérique les infrastructures avant 1986: des équipements scolaires (30 classes primaires et 20 classes secondaires); un noyau commercial avec un marché de 400 places; un dispensaire; des équipements sportifs et de loisirs... Malheureusement, dans la pratique, rien n'a été fait.

En effet, jusqu'à la fin de cette étude, en mars 1989, aucun de ces projets n'a été entrepris dans la banlieue Ouest. Non seulement les équipements n'ont pas été construits, mais les espaces qui devraient leur être réservés sont occupés par des occupations. De plus, dans la zone aucune des personnes enquêtée n'a entendu parler de ce "Schéma Directeur". Ceci nous amène à poser la question de savoir les motivations qui avaient poussé les pouvoirs publics à commanditer ces documents dans la mesure où l'exécution de ce plan a été porté à la connaissance ni des responsables locaux et ni des populations concernées. De plus, il n'a jamais été approprié.

Cette attitude des pouvoirs publics est paradoxale. A quoi cela sert-il de dépenser les maigres ressources du pays pour faire des études qui coûtent si chères alors que si on n'envisage pas d'en utiliser les résultats pour résoudre les problèmes. Jus*** impérieux que les pouvoirs publics adoptent une position dénuée de tout sentimentalisme, surtout quand il s'agit de la question urbaine. Ils doivent penser d'abord à l'intérêt de la collectivité. L'exemple des grandes métropoles d'Amérique latine où la vie dans les périphéries est devenue un véritable ***** donner matière à réfléchir aux autorités congolaises. Il est appréciable que les pouvoirs publics reprennent en main le contrôle et la gestion foncière urbaine en faisant appliquer strictement la loi. Ce ne sera qu'ainsi qu'ils pourront dégager des espaces nécessaires pour implanter les équipements qui font défaut dans ces nouveaux quartiers.

Pour calibrer l'envergure des équipements, il suffirait de se référer au rythme de croissance de la ville en fonction de l'évolution entre les deux derniers recensements. En ce qui concerne la zone de notre étude, nos calculs nous ont donné 9.060 habitants pour 1990; 15.418 habitants en 1995; 26.238 habitants en 2000 et 44.572 habitants en 2005. En tenant compte de cette évolution, nous avons déterminé des **** d'équipement *** comme présenté au tableau n° 5 (voir figure n° 7 pour la répartition spatiale).

Selon les estimations que nous avons faites, pour équiper de ***** la zone il faudra pour 1990 construire 2 écoles maternelles, 2 primaires, 1 collège, 1 dispensaire, 2 terrains de sport, 1 cinéma, 1 bibliothèque, 6 bornes-fontaines et 2 petits marchés. Pour l'an 1995, il faudrait 3 écoles maternelles, 3 primaires, 1 collège, 1 lycée, 1 centre hospitalier, 1 dispensaire, 1 grand marché, 2 terrains de sport, 1 cinéma, 1 bibliothèque, 12 bornes-fontaines et 3 petits marchés pour 15418 habitants. A l'an 2000, il faut ajouter aux équipements existants 1 école primaire, 4 bornes-fontaines et 1 petit marché pour 26238 habitants et enfin en l'an 2005, 1 nouvelle école maternelle et 2 bornes-fontaines pour 44572 habitants. En suivant ce schéma, on devrait en principe atteindre une autonomie totale de la zone en 1995, et en l'an 2000, on aura un embryon de ville nouvelle. Cette ville nouvelle ne sera plus dépendante de Brazzaville comme c'est le cas actuellement, mais plutôt complémentaire.

Tableau n° 5: Planification des équipements de la zone

EQUIPEMENT

A N N E E S

1985

1990

1995

2000

2005

Maternelle

0

2

3

3

4

E. Primaire

2

3

3

4

4

Collège

0

1

1

1

1

Lycée

0

0

1

1

1

Hôpital

0

0

1

1

1

Dispensaire

1

1

1

1

1

Marché

0

0

1

1

1

T. Sport

0

2

2

2

2

Cinéma

0

1

1

1

1

Bibliothèque

0

1

1

1

1

B. Fontaine

0

0

12

16

18

Petit marché

1

2

3

4

4

Source: Estimations par l'auteur

Le financement de ces équipements pourrait être constitué par participation conjointe de la population et de l'Etat. La participation étatique pourrait se faire, dans un premier temps, par une prise en charge du coût des équipements lourds nécessitant un déblocage immédiat de fonds imputés et que la population ne pourra pas assurer. C'est notamment le cas pour les équipements sanitaires, scolaires, commerciaux, sportifs et les réseaux d'eau et d'électricité. La participation populaire pouvait se faire par une surtaxation à l'utilisation de ces équipements jusqu'à amortissement complet des investissements réalisés.

Pour la protection du milieu naturel, seule une campagne de sensibilisation populaire massive pourrait faire prendre conscience des enjeux. Il s'agira surtout d'inciter les gens à planter des pelouses pour protéger leurs cours et à installer des gouttières pour collecter et canaliser les eaux des toits. Quant à la municipalité, elle devra ouvrir des rues, creuser des caniveaux, assurer régulièrement leur **** et l'évacuation des ordures. Elle devra également d***** les *** pour utilité publique de chaque zone en adoptant, par exemple, un Plan d'Occupation du Sol (P.O.S.). Elle ne devra pas **** hésiter à faire déguerpir les personnes qui occupent les sites dangereux ou ***** ces derniers devant être classées "zones protégées".

Cette stratégie semble difficile à appliquer en raison des problèmes financiers auxquels l'Etat est confronté: cependant, elle est ré****** l'adhésion populaire à sa mise en pratique. Dans cette perspective, les efforts que déploient actuellement les habitants pour s'organiser et assainir leur cadre de vie devront être exploités au

Figure n° 7: Proposition d'équipement de la zone

mieux. L'exemple de la maternité de Madibou et celle de l'extension du réseau d'eau dans ce quartier par les habitants eux-mêmes prouvent à suffisance que les populations sont disposées à coopérer. Il reste à trouver les moyens de mobiliser cette population du pays. De plus, la participation populaire en tant qu'engagement individuel des habitants est une garantie de l'entretien des équipements ainsi réalisés. Il est donc urgent que les pouvoirs publics rompent avec les pratiques actuelles, chargées de sentimentalisme, de crainte de réactions populaires et de "technicité. Les collectivités devraient être ****** associées à la prise de décision en matière d'urbanisme et d'aménagement urbain. C'est le seul chemin qui puisse garantir des résultats à p** de coût (NZUZI NZUZI, 1986).

CONCLUSION

La population de Brazzaville s'est très fortement accrue sous l'effet. Au cours de ces deux dernières années combiné à un fort courant migratoire et un accroissement naturel élevé.

Cette explosion démographique a entraîné une extension spatiale sans précédent vers les zones rurales environnants. Les limites naturelles que ****** et les *** pour **** les villages périphériques qu'elle a progressivement "phagocytés". Malheureusement, cette extension s'est étendues sur un site collinaire, sableuse, non adaptée à une occupation humaine intense.

Cette péri-urbanisation s'est traduite dans l'espace par une transformation totale du paysage. Les activités rurales ont disparu aux profits des activités urbaines, notamment les petits métiers et les activités informelles caractéristiques des villes du Tiers-Monde. Elle est surtout due à la *** migration des anciens citadins des quartiers centraux vers les nouvelles extensions. Ceux-ci représentent 64,4 % de la population des quartiers périphériques alors que ceux venus directement de la campagne ne constituent que 17,6 %

Les principales causes de cette migration vers la périphérie sont d'une part la spéculation foncière l'augmentation considérable des loyers dans les quartiers centraux et, d'autre part, les prix des terrains abordables à la périphérie. D'autres faits sont *** à l'origine de ce moment, des règles d'héritage, les nuisances et diverses contraintes liées à la promiscuité dans les vieux quartiers de la ville.

Par ailleurs, le développement spontané des quartiers périphériques a entraîné de nombreux problèmes. Sur le plan de l'occupation de l'espace, la destruction du couvert végétal et l'érosion qu'elle provoque contribue à la dégradation rapide du milieu naturel. Sur le plan niveau foncier, les nombreux litiges entre vendeurs et acquéreurs ou entre acquéreurs qui traduisent bien l'anarchie qui règne dans ce domaine. Les équipements sont très insuffisants quand il existe de sorte que les habitants sont totalement dé*** aux quartiers centraux et du centre-ville pour satisfaire tous leurs besoins. C'est notamment le cas pour l'éducation, la santé, l'approvisionnement aux biens de l'**** et les services administratifs. L'absence de toute activité formelle transforme ces quartiers en banlieues dortoirs sans aucune fonction urbaine réelle et rend le problème de l'emploi encore plus aigu. Ces quartiers ****** des excroissances parasites que de véritables quartiers urbains, car ils ne sont pas du tout intégrés au système urbain. Il n'y a pas d'interconnexion des réseaux d'eau et d'électricité de la ville. Les habitants sont obligés de prendre eux-mêmes en charge les coûts des ****. Aussi peut-on légitimement se poser la question de savoir si nous avons à faire à des quartiers urbains ou non.

Pour remédier à cette situation, il faudra repenser complètement les pratiques urbaines actuelles et adopter une nouvelle approche permettant alors de résoudre globalement ces problèmes. Ce ne sont ni les moyens techniques ni la légitimité qui font défaut. Le Schéma Directeur d'Urbanisme adopté par l'Assemblée nationale en 1980, offre de nombreuses surprises qui auraient dû def** être appliquées. Mais aucun effort n'a été fait pour l'appliquer. Ce qui a conduit à la situation que nous connaissons tous aujourd'hui. Pour cette raison, il devrait souhaiter que les pouvoirs publics *** de stratégies et que soient bannies les pratiques sentimentalistes et technicie** pour une nouvelle politique basée sur la participation populaire et visant avant tout l'intérêt général de la collectivité.

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