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Reports from
Union of African Population Studies / L'Union pour l'Etude de la Population Africaine
Num. 38, 1999
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Union for African Population Studies, Rapport de Synthese / Summary Report,
Numéro/Number 38, Juillet/July, 1999
PROGRAMME DE PETITES SUBVENTIONS POUR LA RECHERCHE EN POPULATION
ET DEVELOPPEMENT
COMMUNICATION ET MAITRISE DE LA FECONDITE : UN MARIAGE DE
RAISON
Gisèle Langue-Menye, ESSTIC1, Evina
Akam2, Paulette Beat Songue3
1Université de
Yaoundé II,
2IFORD / Université de Yaoundé II
3Département
de Sociologie / Université de
Yaoundé I
Code Number: uaps99038
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS
RESUME
INTRODUCTION
CHAPITRE I
CONTEXTE GENERAL DE L'ETUDE
1.1. Description du milieu physique et humain
1.2. Aspects démographiques
1.3. Contexte social
CHAPITRE II
METHODOLOGIE
2.1. Problématique
2.2. Objectifs
2.3. Champ de l'étude
2.4. Méthode de collecte des données
2.5. Techniques d'analyse
CHAPITRE III
CONNAISSANCE ET PRATIQUE DE LA CONTRACEPTION11
3.1. Connaissance des méthodes contraceptives
3.2. Pratique de la contraception
CHAPITRE IV
IMPACT DES PROGRAMMES DE SENSIBILISATION A LA PLANIFICATION FAMILIALE
4.1. Sensibilisation de la population à la P.F
4.2. Messages retenus lors des campagnes de sensibilisation
CHAPITRE V
LA PRATIQUE CONTRACEPTIVE
5.1. Importance de l'enfant
5.2. Motivations et freins à l'utilisation de la contraception
5.3. Perceptions
5.4. Attitudes et comportements
CHAPITRE VI
SCHEMAS DE COMMUNICATION ET PRATIQUES CONTRACEPTIVES
6.1. Sources d'information
6.2. Prescripteurs et réseaux de communication
CHAPITRE VII
DIFFUSION DES MESSAGES
7.1. Formes et contenus des messages
7.2. Choix des médias, des supports et des relais d'information
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
REMERCIEMENTS
Léquipe de recherche remercie sincèrement
:
-M. Ngoy Kishimba, chercheur à lInstitut de Formation
et de Recherche Démographiques (IFORD) qui nous a donné une
formation en SPSS et supervisé le traitement informatique des données
;
-le Pr. Fame Ndongo Jacques, enseignant à lEcole
Supérieure des Sciences et Techniques de lInformation (ESSTIC), pour
ses conseils, ses encouragements et sa disponibilité ;
-le Ministère des Affaires sociales et de la Condition
féminine du Cameroun et en particulier Mme Ngo Basse Emilienne pour
son aide administrative ;
-lInstitut de Formation et de Recherche Démographiques
(IFORD) et son Directeur, le Dr. Akoto Eliwo M., pour tout lappui logistique
qui a été mis à notre disposition pour la réalisation
de ce projet ;
-lEcole Supérieure des Sciences et Techniques de
lInformation (ESSTIC) et son Directeur, M. Joseph Marc Omgba, pour le soutien
apporté tout au long de cette recherche ;
Mme Marième Diop, Directrice du PNPF (Sénégal)et
du Dr Jacqueline Ekambi Moutome de lUniversité de Yaoundé I,
pour leur évaluation critique qui a permis daméliorer le fond
et la forme du manuscrit.
Notre profonde gratitude va aux autorités administratives
et traditionnelles de la ville dEbolowa et tout particulièrement à sa
population, acteur principal de cette recherche auprès de qui ont été recueillies
toutes les informations présentées dans cette étude.
Notre reconnaissance va enfin, à notre encadreur
scientifique le Pr. Ngondo, à Pitshandenge de lUniversité de
Kinshasa et à lUnion pour lEtude de la Population Africaine (UEPA)
pour la confiance quelle nous a accordé en acceptant de la financer.
Que tous ceux qui ont participé de près ou
de loin à la réalisation de ce rapport de recherche trouvent
ici nos remerciements et notre profonde gratitude.
RESUME
Cette étude se propose d'analyser l'impact d'une campagne
de communication relative à la planification familiale (PF) dans un
centre semi-urbain du Cameroun nommé Ebolowa. Elle met en lumière
les projets qui y sont développés, les connaissances et les pratiques
contraceptives de ses populations, leur rapport à la pratique contraceptive,
examine les formes et schémas de communication qu'empruntent les messages
diffusés sur la planification familiale.
Réalisée au moyen d'une enquête de terrain
auprès d'un échantillon de 597 personnes, elle souligne la centralité de
la communication dans la réussite des campagnes de sensibilisation, évalue
les niveaux de connaissance et de pratique des méthodes contraceptives
et met en relief des facteurs susceptibles d'améliorer l'efficacité de
la communication : le choix judicieux des sources d'information, la sélection
rigoureuse des canaux et réseaux de communication et la bonne formulation
des messages. Ainsi, elle montre que la maîtrise du processus de communication
est une des clés du succès des campagnes de communication sociale.
INTRODUCTION
A l'aube des années 90, la recherche en démographie
met l'accent sur la nécessité d'une approche qualitative (Enquête
Africaine en Population, 1992). Cette orientation nouvelle a pour ambition
de pallier les insuffisances des précédentes recherches en démographie
et de faciliter une meilleure compréhension des phénomènes
démographiques, en particulier celui de la fécondité.
En effet, qu'elles relèvent du psychologique, du sociologique ou de
l'anthropologique, ces études insistent, entre autres points, sur la
connaissance approfondie des schémas culturels associés à la
fécondité, c'est-à-dire sur l'analyse et la prise en compte
des croyances, pratiques et rites relatifs à la fertilité et à l'enfant.
Elles s'intéressent à la perception du rôle de l'enfant
dans la société, soulignent l'importance accordée à la
reproduction en matière de vie sexuelle et familiale dans les modèles
traditionnels et permettent aussi de comprendre l'attitude des populations
urbaines et rurales face à la contraception.
Les données ainsi collectées sont riches en
enseignements sur les variables socio-culturelles influant sur la fécondité.
Elles aident à la conception et à la formulation de politiques
de population plus élaborées et plus réalistes. Aussi,
l'objet de cette recherche, à savoir la problématique de la communication
en matière de fécondité, s'oriente-t-elle vers l'approche
qualitative.
Les programmes d'Information, Education et Communication (IEC)
sont en effet un des aspects et moyens de la mise en oeuvre de la politique
de maîtrise de la procréation. Bien conçus, ils permettent
de sensibiliser les populations sur les conséquences positives d'une
fécondité maîtrisée : amélioration de la
santé de la mère et de l'enfant, bien être familial, équilibre
population/ressources.
La problématique de la communication en matière
de population, domaine de recherche marginalisé au Cameroun et souvent
limité à la réalisation d'enquêtes CAP, est la préoccupation
qui parcourt cette étude. Celle-ci se propose d'évaluer l'impact
d'une campagne de communication Ebolowa à travers une enquête à la
fois quantitative et qualitative portant sur 597 personnes. Ensuite, elle met
en évidence les niveaux de connaissance et de pratique contraceptives
et, enfin, procède à l'évaluation réelle de la
campagne de communication sur le plan de la pertinence des canaux et réseaux
de communication utilisés, des formes de discours retenues, des médias,
supports et personnes-relais choisis.
CHAPITRE I
CONTEXTE GENERAL DE L'ETUDE
La description du cadre de l'enquête a pour objectif de préciser
le milieu de vie des populations.
1.1 - Description du milieu physique et humain
La ville d'Ebolowa compte environ 40.000 habitants. Elle se
trouve dans la province du Sud qui couvre une superficie de 47.190 km² et avait
une population estimée à 373.798 habitants au dernier recensement
de 1987, soit une densité de 8,98 habitants au km². Zone de forêt,
cette province est située dans une bande bordée au nord par la
province du centre, à l'ouest par l'Océan Atlantique et au sud
par les Territoires de la Guinée Equatoriale, du Gabon et du Congo (cf
carte : annexe). Elle comprend quatre départements et 21 arrondissements.
La province du Sud a une vocation agricole avec 80 % de la
population qui vit soit de l'agriculture de rente ou de cultures vivrières.
Ses richesses sont constituées de ressources forestières localisées
dans une bande de terre d'une superficie de 4.705.000 hectares puis de grandes
et moyennes exploitations agricoles. La culture du cacao représente
8,2 % de la production nationale et celle du café 7,4 %. A ces cultures,
il convient d'ajouter des plantations d'hévéa, une unité de
transformation de l'hévéa en caoutchouc (HEVECAM-NIETE) et de
grandes palmeraies appartenant à la Société Camerounaise
des Palmeraies (SOCAPALM). L'activité touristique y est également
florissante puisqu'on note un afflux de touristes dans la région de
Kribi, qui est également une importante zone de pêche (822,456
tonnes de poissons mises à terre en 1990).
L'intérêt de cette recherche dans la province
du Sud et la ville d'Ebolowa se justifie par les raisons majeures ci-après
:
-le site a été rarement choisi pour conduire
une enquête, bien qu'il ait fait l'objet d'une investigation dans le
cadre de l'EDSC (MINPAT, 1991). Cependant, depuis trois ans, une attention
particulière est portée à Ebolowa, compte tenu de la forte
concentration d'une population jeune qu'on y observe, de la sexualité précoce
de ses adolescentes et du fait que cette ville abrite un hôpital de grande
notoriété (Enongal) où sont développés des
programmes de sensibilisation à la planification familiale.
-L'homogénéité culturelle de la province
peuplée essentiellement de Béti et de Fang;
-la vocation agricole qui permet de percevoir et de comprendre
les comportements et attitudes natalistes chez les populations rurales vivant
dans une zone agro-écologique spécifique : la forêt ;
-ville carrefour située à 120 kilomètres
de Yaoundé promue chef lieu de la province du Sud, Ebolowa est un lieu
de rencontres des populations rurales et urbaines de diverses origines, un
centre d'échanges commerciaux et de diffusion de l'Eglise Presbytérienne
camerounaise.
1.2 - Aspects démographiques
Cette étude se justifie également par les niveaux
de fécondité élevé qui sont observables dans la
zone. Le taux brut de natalité était de 42 naissances pour 1000
habitants au recensement de 1987 et l'indice synthétique de fécondité se
situait à 5,8 enfants par femme lors de l'EDSC de 1991 du ministère
du Plan et de l'Aménagement du Territoire (MINPAT) (cf. tableau n° 1).
Elle se justifie, enfin, par la faible prévalence des méthodes
contraceptives modernes.
D'après le recensement de 1987, 10,5 % des femmes connaissent
et utilisent un contraceptif. En 1991, l'EDSC fixe leur ratio à 72,5
% et montre aussi que les méthodes dites modernes, plus connues que
celles dites traditionnelles (66,4 % contre 60,9 %), sont néanmoins
peu utilisées. Ainsi, 19,7 % des enquêtées font usage de
contraceptifs et 4,2 % d'entre elles ont recours aux techniques "modernes" (stérilisation,
pilule, etc.) Chez les hommes, on observe les mêmes tendances.
Tableau n° 1 : Taux de fécondité générale
par groupes d'âges pour 1.000 femmes (en %) et Indice synthétique
de Fécondité (ISF) selon l'ENF (1978), le RGPH (1987) et l'EDSC
(1991).
GROUPE D'AGE DE LA FEMME |
TAUX DE FECONDITE PAR AGE (%0) |
|
ENF 1978 |
RGPH 1987 |
EDSC 1991 |
15 - 19
20 - 24
25 - 29
30 - 34
34 - 39
40 - 44
45 - 49
ISF (15-49) |
186
295
276
220
155
106
36
6,37 |
143
264
257
205
146
67
14
5,48 |
164
282
260
228
149
62
20
5,82 |
Source :Enquête Démographique et de Santé,
Cameroun, Direction Nationale du Deuxième Recensement Général
de la Population et de l'Habitat Yaoundé, 1991.
1.3 - Contexte social
La réussite d'un programme de communication dépend
de la prise en compte de l'environnement socio-culturel des populations dans
lequel il s'insère, notamment de la représentation de l'enfant
dans le cadre d'une politique de planification familiale.
Chez les Bétis et Fang du Centre et du Sud, l'enfant
est associé à la richesse, à la divinité ; c'est
un don de Dieu. En outre, il symbolise la virilité chez l'homme ou la
féminité chez la femme ; il est aussi une force productive ou
une assurance pour les vieux jours. Dès lors, on comprend mal qu'il
faille s'engager dans une campagne de réduction de la natalité.
Le discours relatif à la réduction des naissances ne peut, dans
un tel contexte, que rencontrer un écho défavorable auprès
des populations.
Ce contexte est aussi celui d'une personnalisation des relations
humaines. La validation de ce propos en ce qui concerne la transmission des
messages passe par le rapport à la source émettrice. Celle-ci
doit être facilement identifiable, car elle confère une crédibilité au
message véhiculé et fait référence à l'autorité de
son émetteur. Ainsi, chez les Bétis du Sud-Cameroun, le rôle
dévolu à la grand-mère, à la mère, à la
belle-mère, à la tante, à la première épouse
dans un ménage polygame et à l'aînée, est essentiel
dans l'éducation de la jeune fille. Les proverbes, danses, histoires
contées, chants, sont des canaux privilégiés de la transmission
de l'information relative à la sexualité (Abega,1995). Ces thèmes évoqués
dans d'autres lieux susciteraient indignation et réprobation puisqu'ils
sont, en règle générale, considérés comme
des sujets tabous.
Dès lors, il faut intégrer un tel modèle
de communication incluant les codes, valeurs, canaux spécifiques aux
populations-cibles, pour influer positivement sur l'adoption de nouveaux comportements
et pratiques en matière de reproduction.
CHAPITRE II
METHODOLOGIE
2.1 - Problématique
Les stratégies de communication portant sur la planification
familiale ont pour finalité le changement d'attitudes et de comportements
liés à la reproduction. Après la mise en oeuvre des premiers
programmes de sensibilisation relatifs à la PF, on peut s'interroger
sur les connaissances et pratiques accumulées en la matière,
notamment en ce qui concerne la communication.
2.2. Objectifs
Il s'agit de préciser l'impact de la campagne de communication
déployée à travers :
1)l'identification des acteurs réels de la communication
:
-qui communique ? Qui est source de parole ? Qui a le pouvoir
de communiquer dans les schémas relationnels traditionnels et modernes
?
-Qui reçoit les messages ? Qui est la cible du message
? Pour la fécondité, est-ce la femme, l'homme, le couple, le
groupe d'âge, la cellule familiale élargie ou la tribu?
-Qui est le prescripteur ? Qui influence la prise de décision
en matière de fécondité ? S'agit-il d'individus ou de
structures ? Qui sont les personnes ressources ? Qui sont les leaders d'opinion
?
2)L'identification des messages à véhiculer
: choix de la thématique, des images et des mots, c'est-à-dire
des concepts dénotés et connotés, types de messages (verbal,
iconique, etc.) en rapport avec l'environnement socio-culturel ;
3)l'identification des réseaux de communication
: lieux de passage des informations à diffuser au sein d'une collectivité type
et structure du réseau utilisé ;
4)la sélection des canaux idoines, autrement
dit le choix des médias et supports susceptibles de toucher effectivement
les personnes-cibles auxquelles on destine le message.
5)le choix des communicateurs, c'est-à-dire
des hommes et des femmes ayant une maîtrise des schémas culturels
en vigueur dans la société étudiée, est capital.
Leur tâche englobe la conception de campagnes d'informations appropriées
ainsi que l'élaboration de stratégies de communication propres à réduire à court
terme et à lever à long terme les obstacles favorisant l'adoption
d'attitudes et de comportements natalistes.
2.3. Champ de l'étude
L'étude a porté sur un échantillon de
597 individus dont 203 hommes et 394 femmes. Le nombre des femmes est plus
important car la pré-enquête a révélé qu'elles
sont les premières utilisatrices de contraceptifs.
2.4. Méthode de collecte des données
L'enquête comprenait à la fois un volet quantitatif
(administration d'un questionnaire comprenant 96 questions) et un volet qualitatif.
Pour le premier volet, on a eu recours à quatre enquêteurs.
Quant à l'enquête qualitative, outre la consultation
de documents, elle consistait en divers entretiens semi-directifs réalisés
auprès de personnes-ressources : chefs de quartier, personnel médical,
responsables d'associations, responsables religieux, responsables administratifs
et locaux.
Elle a également comporté la conduite de focus
groups ou discussions en groupes ciblés. La technique du focus
group discussions (discussions en groupes ciblés) a été utilisée
pour obtenir des informations complémentaires auprès des populations.
Celles-là ont été recueillies auprès de six groupes,
dont cinq groupes d'adultes et un groupe de jeunes. Ces groupes étaient
constitués ainsi qu'il suit:
- Groupe 1 :femmes utilisant les méthodes contraceptives
traditionnelles ;
- Groupe 2 :femmes utilisant les méthodes contraceptives
modernes;
- Groupe 3 :femmes utilisatrices et non utilisatrices de la
contraception ;
- Groupe 4 :hommes utilisateurs de méthodes contraceptives
traditionnelles ;
- Groupe 5 :hommes favorables à la contraception ;
- Groupe 6 :élèves des deux sexes.
2.5. Techniques d'analyse
L'analyse a été faite en deux étapes
:
- la première a consisté en l'étude descriptive
des données quantitatives, à l'aide des analyses de régression
et du khi-deux ;
- la deuxième en l'exploitation des données
des discussions en groupes-ciblés (focus group discussions),
grâce à l'analyse de contenu. Ceci a permis de compléter
l'interprétation des données de l'enquête quantitative.
CHAPITRE III
CONNAISSANCE ET PRATIQUE DE LA CONTRACEPTION
Les niveaux de connaissance et de pratique de la contraception
permettent d'apprécier l'impact des campagnes de sensibilisation à la
planification familiale dans la ville d'Ebolowa.
3.1. Connaissance des méthodes contraceptives
Près de 80 % de la population d'Ebolowa connaît
au moins une méthode contraceptive. Cette connaissance est plus forte
chez les femmes que chez les hommes. Chez les premières, la méthode
contraceptive la plus citée est la pilule (32,3 %), suivie des condoms
(43,9 %) et du calendrier (49,1 %). Les méthodes les moins bien connues
sont la stérilisation féminine (6,9 %) et les ovules vaginaux
(7,6 %). Les hommes connaissent mieux les condoms (67 %), la pilule (22,2 %)
et citent moins souvent la stérilisation masculine (44 %), les rites,
les cordes et l'infusion.
3.2. Pratique de la contraception
On note un écart entre le niveau des connaissances
et la pratique contraceptive. Si 79,4 % de l'échantillon connaît
au moins une méthode contraceptive, seuls 65 % de ces individus utilisent
une méthode contraceptive. Chez 55,2 % des hommes et 28,4 % des femmes,
le condom est la méthode la plus utilisée. Il est suivi du calendrier
(27,4 %). La stérilisation (des deux sexes) est, quant à elle,
la méthode contraceptive la moins pratiquée.
Le profil-type de l'utilisateur des méthodes contraceptives
est le suivant à Ebolowa: un individu dont l'âge se situe entre
30 et 39 ans ; de niveau d'instruction secondaire ou plus; originaire d'une
des provinces suivantes : Ouest, Nord-Ouest, Centre, Sud, Est; marié,
s'il s'agit d'une femme, ayant accès aux émissions télévisées;
et mère de quatre à huit enfants.
Les raisons invoquées prioritairement par les femmes
sont la peur des grossesses non désirées et le besoin de se protéger
contre les maladies sexuellement transmissibles (MST). Chez les hommes, les
raisons classées par ordre de priorité sont: la prévention
de ces pathologies et des grossesses de la partenaire.
CHAPITRE IV
IMPACT DES PROGRAMMES DE SENSIBILISATION A LA PLANIFICATION FAMILIALE
Il s'agissait d'évaluer la proportion de la population
ayant été sensibilisée à la planification familiale
et l'essentiel du message retenu par la population au terme de campagnes de
sensibilisation organisées sur la question.
4.1. Sensibilisation de la population à la P.F
Le tableau suivant rend compte de la proportion d'hommes et
des femmes ayant été sensibilisée à la PF selon
la source de sensibilisation.
Tableau 2 : Proportion (%) d'hommes et de femmes selon
la source de sensibilisation à la planification familiale.
SOURCES DE SENSIBILISATION |
HOMME |
FEMME |
TOTAL |
1. Radio
2. Télévision
3. Affiches
4. Centre de santé |
71,4
54,2
51,2
21,2 |
65,0
42,1
45,7
32,7 |
67,2
46,2
47,6
28,8 |
EFFECTIF |
203 |
394 |
597 |
La radio est la source de sensibilisation qui atteint le plus
grand public, alors que très peu d'hommes (21,2 %) et de femmes (32,7
%) ont été sensibilisés à la PF dans les centres
de santé. Ce média demeure en milieu rural le principal canal
d'information. Il devance largement la télévision et les affiches.
Concernant les femmes, même si la quasi-totalité d'entre-elles
a déjà suivi la campagne de P.F à la radio, le propos
d'une des intervenantes: "une femme de 40 ans, ou bien de 30 ans, qui va dans
son champ, n'écoute pas forcément la radio", interpelle les promoteurs
des campagnes sur les moments de diffusion de leurs messages.
4.2. Messages retenus lors des campagnes de sensibilisation
Le contenu des messages diffusés à la radio
et à la télévision est pauvre parce que constitué essentiellement
de formules-types et de slogans. "Ce ne sont que des condensés à la
télé, c'est trop bref", dit un élève. Les messages
ne sont pas assez explicatifs, ils sont trop "techniques" et mal conçus,
disent quelques personnes ressources.
Le message essentiel retenu est, tout sexe confondu, que la
P.F sert à "éviter le SIDA et les MST". Ceci rend compte, dans
la lutte contre ces pathologies, de la concomitance des campagnes de sensibilisation à la
PF et de promotion du condom, c'est-à-dire de valorisation de l'usage
du préservatif. Ce résultat pose le problème de la coordination
des activités de communication déployées sur un même
site.
CHAPITRE V
LA PRATIQUE CONTRACEPTIVE
Beaucoup de raisons sont fournies pour justifier ou remettre
en cause la pratique contraceptive.
5.1. Importance de l'enfant
La valeur accordée à l'enfant se justifie essentiellement
par quatre raisons : l'enfant est une force productive ; il assure la pérennité de
la famille ; il est un motif de fierté sociale ; il entretiendra les
parents à leur vieillesse.
Cette importance se lit aussi à travers le nombre d'enfants
désirés. Pour la femme mariée, près de la moitié des
enquêtés (47,6 %) pensent qu'une femme mariée devrait en
avoir au moins huit. Près d'une autre moitié (47,4 %) pense qu'une
femme devrait en avoir plutôt entre quatre à sept. Ceci traduit
une propension de la population d'Ebolowa à rechercher un nombre relativement élevé d'enfants
au sein des ménages.
5.2. Motivations et freins à l'utilisation de la
contraception
Parmi les autres données justifiant l'utilisation de
la contraception, la raison la plus couramment évoquée est la
prévention des grossesses non désirées (41,4 % des enquêtés).
Suit la raison "Eviter les maladies" (31 %) alors que l'espacement des naissances
ne vient qu'au troisième rang des raisons évoquées pour
justifier l'utilisation de la contraception. Le tableau n° 3 rend compte du
contraste ainsi constaté.
Dans lensemble, éviter une grossesse non désirée
est la raison la plus couramment évoquée pour justifier lutilisation
dun contraceptif. Cependant, chez les hommes, le souci déviter des
maladies est le motif prédominant alors que pour les femmes, outre la
grossesse, la pratique contraceptive est justifiée par la volonté d'espacer
les naissances.
Tableau n° 3 : Taux d'utilisation à un moment quelconque
de la contraception selon les motivations par sexe.
MOTIVATIONS A L'UTILISATION DE LA CONTRACEPTION A UN MOMENT QUELCONQUE |
Taux d'utilisation de la contraception selon les motivations |
|
HOMME |
FEMME |
ENSEMBLE |
1. Eviter les grossesses non désirées
2. Eviter les maladies
3. Espacer les naissances / grossesses
4. Limiter les enfants / grossesses
5. Amélioration de la santé de la mère et de l'enfant
6. Ne voudrait pas davantage d'enfants
7. N'applique pas
8. Ne sait pas |
40,4
49,8
12,8
10,3
6,9
4,4
1,5
0,0 |
41,9
21,3
25,1
7,4
6,3
3,3
0,8
0,5 |
41,4
31,0
20,9
8,4
6,5
3,7
1,0
0,3 |
EFFECTIF |
203 |
394 |
597 |
Sagissant des freins, les femmes ont évoqué l'absence
de plaisir liée à l'usage du condom et la jalousie. Ce dernier
frein se lit dans les propos suivants rapportés par les enquêtés
: "il a dit que je ne voulais plus accoucher parce que je voulais déjà suivre
les hommes". "Ma femme ne peut pas utiliser cette méthode, elle risque
d'aimer les hommes", "Il a dit que lui n'aime pas cette histoire-là.
Parce que quand la femme a la pilule, elle se permet tout. Elle sait qu'elle
peut passer n'importe où à n'importe quel moment".
L'abandon de la pratique contraceptive est justifiée
par le désir d'avoir un autre enfant. Chez les femmes et les hommes,
les ratios sont respectivement de 55,5 % et de 37,3 %.
La deuxième raison évoquée par les femmes, à savoir
les effets secondaires indésirables, a donné lieu à des
explications plus détaillées lors des discussions de groupes.
Elles se résument en quelques déclarations-types pour l'arrêt
de la pilule, à savoir : "J'avais des vertiges, des nausées", "J'avais
des maux de ventre ; je vomissais", "Je grossissais trop, mes habits ne m'allaient
plus".
Tableau n° 4 : Pourcentage des personnes enquêtées
selon le motif d'abandon de l'usage de la contraception.
RAISONS POUR L'ABANDON DE L'USAGE DE LA CONTRACEPTION |
Pourcentage des personnes enquêtées selon
le motif d'usage de la contraception |
|
HOMMES |
FEMMES |
ENSEMBLE |
1. Effets secondaires
2. Souhait d'avoir un autre enfant
3. Pression de la famille
4. Pression du conjoint
5. Négligence
6. Ne sait pas |
62,0
37,3
1,5
37,3
6,0
6,0 |
18,5
55,5
1,7
17,3
6,9
4,0 |
15,0
54,0
1,7
22,9
6,7
4,6 |
EFFECTIF |
67 |
173 |
240 |
Cependant, l'ignorance et le poids des croyances conduisent
aussi à l'abandon de la pilule contraceptive. Les femmes qui sont les
auteurs de ces renoncements sont souvent influencées par le discours
d'une parente ou d'une amie. C'est le cas de l'une des participantes aux discussions
de groupe : "J'avais commencé à utiliser la pilule comme ça,
qu'on m'avait conseillé. Je n'avais pas de problèmes ... Après
un temps, j'avais arrêté ... J'avais conçu. Juste parce
qu'on m'avait découragé que la pilule donne le cancer, beaucoup
de choses-là, ça m'avait découragé et j'avais laissé.
J'avais conçu. J'avais déjà peur de la pilule."
L'abandon de l'usage du stérilet est expliqué par
les saignements. Des personnes enquêtées considèrent que
ces saignements abondants sont enregistrés pendant ou entre les menstruations.
Les préjugés négatifs associés
aux méthodes modernes de contraception justifient ces réserves
manifestées par les adolescentes et les femmes adultes. "Les gens disent
que ça a toujours des inconvénients, surtout les méthodes
contraceptives artificielles", affirme l'une des femmes interrogées,
comme pour servir d'écho à toutes les autres candidats au renoncement à la
P.F.
5.3. Perceptions
Les réponses aux questions sur les perceptions en cours
laissent entrevoir deux niveaux de discours : le discours officiel, favorable à la
planification familiale et le discours privé (saisi notamment à travers
les discussions en groupes) comportant des préjugés négatifs.
Ces préjugés se rapportent aux effets secondaires indésirables
produits par les contraceptifs artificiels, les enquêtés parlant
de cancer, d'hypertension artérielle provoqués par la pilule,
ou même de stérilité à long terme provoquée
par le stérilet. Quelques enquêtées ont même pensé que
les actions de vulgarisation de la planification familiale participent de visées
commerciales de firmes pharmaceutiques occidentales. Mais dans l'ensemble,
les avis des enquêtés sur les messages relatifs à la contraception
ont été favorables.
5.4. Attitudes et comportements
Les attitudes et comportements des hommes et des femmes peuvent être
appréhendés à travers des points comme l'avis du partenaire
sur l'utilisation des méthodes contraceptives, le besoin d'un supplément
d'information sur les méthodes peu médiatisées et l'appréciation
du savoir-faire dispensé en guise d'instruction en matière de
contraception.
Lors de l'enquête, dans 67,6 % des cas d'utilisation
de méthodes contraceptives, les personnes interrogées déclarent
que leurs partenaires ont un avis favorable. Les femmes soulignent le nécessaire
accord du mari pour recourir à une méthode contraceptive. Parmi
les utilisateurs, la grande majorité (83,1 %), quel que soit le sexe,
souhaite s'informer sur d'autres méthodes contraceptives.
Sur le savoir-faire dispensé en guise d'instruction
relative à la contraception, l'opinion est en général
plus défavorable chez les hommes (53,2 %) que chez les femmes (42,9
%). En revanche, quel que soit le sexe, on préfère que cette
instruction soit donnée en groupe.
Ce constat pourrait s'expliquer par la volonté de se
conformer à la culture de la communauté, et/ou au modèle
du groupe acquis à la contraception. L'information dispensée
et le comportement adopté ne relèvent pas de la seule décision
individuelle, car l'idéologie nataliste est encore fort prépondérante
dans les consciences. Le fait que les femmes acceptent plus volontiers l'instruction
individuelle que les hommes (57,1 % contre 46,8 %) s'explique par leur fréquentation
exclusive des centres de santé où elles peuvent dialoguer avec
les prestataires des services de la planification familiale. En outre, peu
d'hommes sont préoccupés par la contraception et la santé reproductive
de leurs épouses.
Tableau n° 5 : Répartition (%) des personnes enquêtées
selon leur avis sur l'instruction en matière de contraception.
ATTITUDES ET COMPORTEMENTS DES PERSONNES FACE A LA CONTRACEPTION |
Répartition (%) des personnes selon leur avis
sur l'instruction en matière de contraception |
|
HOMMES |
FEMMES |
ENSEMBLE |
1. AVIS SUR L'INSTRUCTION INDIVIDUELLE
· Favorable
· Défavorable
TOTAL
2. AVIS SUR L'INSTRUCTION EN GROUPE
· Favorable
· Défavorable
TOTAL |
46,8
53,2
100,0
86,2
13,8
100,0 |
57,1
42,9
100,0
74,6
25,4
100,0 |
53,6
46,4
100,0
78,6
21,4
100,0 |
EFFECTIF |
203 |
394 |
597 |
Les données des enquêtes quantitative et qualificative
indiquent qu'il faut cibler les groupes constitués dans les campagnes
de sensibilisation. Pour ce faire, il importe d'utiliser des réseaux
de communication fonctionnels.
CHAPITRE VI
SCHEMAS DE COMMUNICATION ET PRATIQUES CONTRACEPTIVES
Schémas de communication, sources d'information et
réseaux de communication sont utilisés dans la circulation des
données relatives à la sexualité et, surtout dans le cas
qui nous intéresse, à la contraception.
6.1. Sources d'information
L'information sur la sexualité circule faiblement.
Ainsi, la moitié des personnes interrogées déclare n'en
avoir pas consommée. Les hommes relèvent qu'il est difficile
de parler de ce sujet avec les parents ou les enfants. Les conseils prodigués
sont à l'actif des femmes adultes dans les villages, des camarades et
amis de l'adolescent. L'école et la maison sont les lieux de leur diffusion.
Près de 3/4 des participantes affirment avoir ainsi reçu des
conseils en matière de santé sexuelle et reproductive, principalement
en ce qui concerne la toilette intime, la maîtrise du cycle, l'identification
des périodes fécondes et des moyens de prévention des
grossesses.
Les sources d'information considérées comme
fiables en matière de contraception et de P.F sont les personnels des
centres de santé, les enseignants, les leaders du mouvement associatif
et les pairs à domicile. Ceci est à prendre en compte dans les
nouvelles stratégies d'IEC à initier.
Les répondants interrogés sur les moyens d'information à utiliser
pour réussir celles-ci disent privilégier la radio, la télévision,
puis l'affiche, le panneau et enfin l'organe de presse écrite.
6.2. Prescripteurs et réseaux de communication
Deux types de réseaux véhiculent les informations
sur la contraception : le réseau interpersonnel dont les acteurs importants
sont les personnes susceptibles d'influencer l'individu dans ses choix, à savoir
les camarades d'âge et les personnels de santé, et le réseau
communautaire, qui met l'accent sur le rôle essentiel des enseignants
et des leaders du mouvement associatif dans les campagnes de sensibilisation à la
P.F.
CHAPITRE VII
DIFFUSION DES MESSAGES
7.1. Formes et contenus des messages
Les formes de discours retenues, à savoir les sketchs
radio-diffusés et spots télévisés, les affiches
et panneaux, le face à face avec les personnels de santé, semblent
efficaces. En effet, elles ont suscité l'attention des personnes enquêtées.
Très peu d'individus ayant déclaré n'avoir rien retenu
de la campagne d'information sur la planification familiale, il convient de
continuer à les utiliser.
En revanche, les contenus des messages à diffuser semblent
encore peu pertinents. En effet, ces textes sont qualifiés de brefs,
ce qui produit une communication "légère", "peu attrayante", "peu
efficace, irréaliste et inadéquate", d'où la nécessité de
revoir les choix effectués au niveau de la forme et du contenu des messages
retenus.
7.2. Choix des médias, des supports et des relais
d'information.
Outre la radio et la télévision, les répondants
ont exprimé d'autres préférences en matière de
média et sources d'information. Si on veut asseoir une stratégie
de communication performante, il faudrait tenir compte des sélections
faites et des lectures sur la fiabilité des médias, s'intéresser
aux leaders du mouvement associatif, aux enseignants et aux personnels de la
santé. En bref, à un ensemble d'acteurs qui sont des interlocuteurs
privilégiés des populations.
Le renforcement des modules portant instruction sur la P.F à l'école
est préconisé par les femmes ; une amélioration des contenus
des slogans et une meilleure implication des personnels de santé ainsi
et des cadres associatifs sont également suggérées.
CONCLUSION
La politique de communication est un des éléments-clés
de la réussite des programmes de planification familiale, de bien-être
social. Elle contribue à la sensibilisation, à l'information
et à l'adhésion des populations-cibles à tout projet de
de planification familiale.
Un certain nombre d'enseignements peuvent être énoncés
:
- la nécessité d'accorder de l'importance à la
forme et au contenu du discours retenu et à l'identification de réseaux
de communication fonctionnels ;
- une meilleure connaissance des méthodes contraceptives
efficaces ;
- un attachement persistant à l'idéologie nataliste
lisible à travers le centralité de la place de l'enfant dans
la reproduction de la communauté ;
- la profonde mutation de la société camerounaise,
visible avec le recul, en matière de sexualité du recours aux
réseaux traditionnels et aux formes de discours que sont les contes,
les proverbes, les chansons, etc.
Une évaluation plus exhaustive des niveaux de pratiques
contraceptives avant et après la mise en oeuvre des programmes de sensibilisation à la
planification est à faire pour mieux appréhender ces enseignements.
Il en est de même avec la mise en perspective d'une évaluation
des programmes déployés à Ebolowa.
Bien que les niveaux de fécondité restent élevés
(la majorité des enquêtés pratiquant la contraception a
entre quatre et sept enfants) on relève des effets positifs des programmes
de sensibilisation à la planification familiale. Ce qui est attesté par
l'offre de plus en plus importante de contraceptifs dans les centres de santé ou,
dans une moindre mesure, par la baisse des naissances entre 1991 et 1994 dans
les hôpitaux.
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Copyright 1999 - Union for African Population Studies.
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